Une première usine de marijuana thérapeutique à Granby

CANNABIS. Dans la foulée des projets d’usines de production de marijuana thérapeutique à Cowansville et dans le Canton de Potton, Granby pourrait aussi avoir la sienne. Un homme d’affaires derrière l’entreprise Farmacan se montre sérieusement intéressé à démarrer un tel projet. Un investissement de plusieurs millions de dollars qui pourrait créer une vingtaine d’emplois a appris GranbyExpress.com.

Par Ugo Giguère et Stéphanie Mac Farlane

Feng Lin, identifié au registre des entreprises du Québec comme président de Farmacan, spécialisée dans la production de marijuana à des fins médicales, lorgne le territoire de Granby. «J’ai fait ma demande de permis à Santé Canada il y a huit mois. Je pense avoir une réponse bientôt», lance Feng Lin, en entrevue avec GranbyExpress.com.

Propriétaire d’autres entreprises, Feng Lin souhaite se lancer dans la production de marijuana thérapeutique «pour soulager la douleur et les problèmes de patients» et aussi par conscience sociale. «Ça diminue les risques publics et sociaux. Quand c’est produit à la maison, il y a plus de chances que ça se retrouve sur le marché noir. Avec le gouvernement, il y a des lois, donc moins de risques pour la population», assure M. Lin.

L’homme d’affaires, qui réside sur la Rive-Sud de Montréal, a entrepris des démarches auprès de la Ville de Granby pour modifier le zonage (voir encadré). «La Ville n’a pas pris de décision. En janvier, elle va publier l’avis de changement de zonage», ajoute-t-il. Granby doit statuer sur la question en février, précise Feng Lin, qui compte bien devenir un citoyen granbyen lorsque son projet prendra son envol.

Une vingtaine d’emplois créés

Le projet Farmacan, qui doit obtenir l’aval de Santé Canada, permettrait de créer une vingtaine d’emplois. La capacité de production de la serre hydroponique légale dépendra du volume octroyé par le permis émis par Santé Canada. Farmacan nécessiterait un investissement de quelques millions de dollars. «Il est trop tôt (pour donner un montant), mais c’est assurément quelques millions de dollars. Il y a l’achat de l’équipement, les divisions du bâtiment et l’achat de la bâtisse», dit-il.

Son projet n’étant pas encore réalisé, Feng Lin projette déjà une seconde phase. «Après le bâtiment, il y a un terrain où on souhaite produire. Après avoir obtenu le permis de Santé Canada, on va faire une nouvelle demande à Santé Canada pour développer.»

À ce sujet, M. Lin serait intéressé à acquérir une bâtisse de la rue de Roberval Sud à Granby d’une superficie d’environ 900 m2. Selon une offre d’emploi publiée sur le portail d’Emploi Québec, il s’agirait du 1129, qui abrite actuellement une entreprise de débosselage. «Je suis l’acheteur de l’endroit», annonce-t-il.

«Rien d’officiel»

Rejointe au téléphone, la courtière immobilière responsable de la vente du 1129, rue de Roberval Sud, Josée St-Martin, dément vigoureusement les prétentions de Feng Lin. Celle-ci qualifie même l’homme d’affaires de «Chinois qui a des difficultés à comprendre les démarches au Québec».

Selon elle, «il n’y a rien de finalisé», mais elle avance que «si tout va bien avec Santé Canada», la transaction pourrait se réaliser «vers mars ou avril». Celle-ci aurait d’ailleurs préféré «éviter de brasser les choses avant que ce ne soit officiel», alors que l’entrepreneur Feng Lin semble pressé d’accélérer le processus.

Mme St-Martin cite notamment l’offre d’emploi diffusée sur le site d’Emploi Québec. «C’est une erreur de M. Lin. Elle va être retirée», a-t-elle déclaré. Ce qui a été fait au lendemain de l’entrevue.

L’agente immobilière tient aussi à souligner que la Ville de Granby a prévu quatre autres endroits sur son territoire pour implanter des usines de production de marijuana thérapeutique. L’une d’entre elles cible précisément la rue de Roberval Sud.

Cannabiculteurs recherchés!

Jeudi dernier, Feng Lin a fait paraître une offre d’emploi sur le portail web d’Emploi Québec, dont la description de tâche indique «cultiver les plants de marihuana». L’employé aura aussi comme fonction de «semer, sécher, emballer», précise la fiche. On dit aussi rechercher quelqu’un avec «expérience sur marihuana».

Toujours d’après l’offre d’emploi, le salaire horaire oscillera en 15$ et 20$ selon l’expérience pour une semaine de 35 heures de travail. Il s’agit d’un poste permanent, à temps plein et des quarts de jour, soir, nuit et fin de semaine pourraient être ouverts. Une autre offre d’emploi publiée sur le même site indiquait que Farmacan souhaitait trouver deux techniciens agricoles pour «[…] déterminer les pourcentages de THC; contrôler la température, l’engrais, l’humidité…».

Les deux offres ont été retirées jeudi soir. «J’ai voulu faire un test. Cultiver de la marijuana à des fins médicales, c’est un nouveau métier», mentionne M. Lin. Il a donc voulu «tester» le niveau de qualification des travailleurs granbyens. «Si j’ai un permis via le programme [de Santé Canada], je voulais avoir une meilleure idée au niveau de l’employabilité. Je voulais savoir s’il y avait des techniciens d’expérience dans ce secteur», poursuit le promoteur. Et le test a été prometteur! «J’ai reçu une centaine de c.v en moins de 24 heures!», lance-t-il avec enthousiasme.

En outre, M. Lin a retenu les services d’un agronome indépendant pour assurer l’assurance-qualité de la production de marijuana. «Santé Canada m’a récemment demandé des informations supplémentaires pour assurer la qualité de la marijuana. C’est un spécialiste qui travaillait au ministère de l’Agriculture.»

Modifications au zonage

Afin de ne pas être pris au dépourvu par des demandes de producteurs de marijuana thérapeutique, la Ville de Granby a identifié quatre zones où elle prévoit permettre ce type d’industries. «C’est une loi fédérale qui tolère ces entreprises, alors on n’a pas le choix. Il faut offrir des endroits où c’est possible de le faire», explique le maire Pascal Bonin.

Ces quatre endroits sont la rue de Roberval Sud (EG04C), la rue Boivin entre Dufferin et Bouchard, la rue York entre St-Hubert et Déragon, ainsi que Dufferin entre Bourget et le 9e rang.

Bien qu’il soit forcé d’offrir des endroits où l’usage est possible, le maire émet certaines craintes. «J’ai des craintes que ce soit pénétrable et que quelqu’un puisse aller voler ça et que ça se retrouve dans nos écoles.»

La police aux aguets

Même si la culture de marijuana à des fins thérapeutiques est légale, le Service de police de la Ville de Granby assure suivre la progression du dossier Farmacan. «Nous sommes au courant de l’avis de motion. Pour l’instant, ce n’est pas encore fait. Il faut que ce soit entériné. Pour l’instant, on ne peut commenter davantage, mais c’est certain qu’on va appliquer les lois et règlements que l’on va pouvoir appliquer», indique l’agent Guy Rousseau, porte-parole du Service de police de Granby. 

Pour connaître la règlementation entourant la mise sur pied d’usines de cannabis thérapeutiques, lisez un texte paru en juin dernier dans notre hebdomadaire de Cowansville