Verglas de 1998: la planche de salut de SOS Dépannage

SOLIDARITÉ. Si SOS Dépannage-Moisson Granby parvient aujourd’hui à en faire autant pour aider les Granbyens qui ont faim, c’est en grande partie grâce à la crise du verglas. Vingt ans plus tard, son directeur général, Norman Dunn, revient sur cette période sombre, qui s’est, au final, avérée un «petit miracle» pour l’organisme.

Lorsque la lumière s’éteint officiellement à Granby le 5 janvier 1998, les tablettes de SOS Dépannage sont heureusement pleines à craquer. L’organisme, à cette époque localisé dans le sous-sol de La Ruche, vient tout juste de clore sa grande Guignolée annuelle.

Constatant la gravité de la situation, le maire de l’époque, Michel Duchesneau, demande à M. Dunn d’improviser un supermarché géant à l’aréna Léonard-Grondin. C’est là que plus de 13 000 personnes sinistrées viendront cueillir des denrées rendues essentielles par la longueur du sinistre.

Ce défi, à la fois magistral et stimulant, le dirigeant n’est pas prêt de l’oublier. «Je manquais un peu de confiance en moi, mais je ne voulais pas le montrer à mon équipe parce que tout le monde comptait sur moi. Tu veux avoir l’air d’avoir le contrôle… La vérité, c’est que je capotais! Je n’en dormais plus le soir», se rappelle celui qui est encore à ce jour à la tête de l’instance.

Selon lui, le fait que les gens aient été si «fins, bons et généreux» est ce qui l’a le plus aidé à accomplir sa mission et jouer son rôle de première ligne. C’est d’ailleurs cette incroyable vague d’entraide, «la plus belle chose qu’il ait jamais vue à Granby», qu’il retient principalement de cet épisode.

«Tout à coup, les gens se rassemblaient, se donnaient un coup de main. On a tiré une belle leçon de vie, je trouve. On dit qu’un moment de tristesse est un moment pour comprendre. Ça fait peut-être cliché, mais moi, ça m’a redonné espoir en l’être humain», lance-t-il. L’homme se souvient d’ailleurs que l’épicerie temporaire fourmillait littéralement de bénévoles. Dévoués, ils ont été environ 250 à prêter main-forte aux victimes de la tempête y faisant la file. C’est sans parler des militaires qui ont grandement contribué. «C’était extraordinaire à voir», se rappelle M. Dunn.

L’affaire de tous

La magie de la crise du verglas ne s’est pas arrêtée là, estime Norman Dunn.  Selon lui, l’événement a contribué à faire tomber les idées préconçues véhiculées au sujet de l’organisation et des personnes à qui elle vient en aide. «Il y avait tellement de préjugés sur les banques alimentaires. Certains disaient qu’elles n’étaient là que pour aider du monde qui ne voulait pas travailler. Le verglas a fait en sorte que les gens ont réalisé que dans une ville comme Granby, elles peuvent jouer un rôle s’il arrive une catastrophe et pas juste pour les démunis, pour tout le monde», ajoute le fondateur de SOS Dépannage-Moisson Granby.

Une planche de salut

Ayant tout tenté pour que l’organisme s’autofinance à une époque où les besoins sont en constante augmentation, l’organisation cumule les déficits depuis déjà quelques années lorsque la crise éclate. Or, durant et après celle-ci, l’aide financière s’accumule. De très nombreux citoyens choisissent, entre autres, de lui remettre leur indemnité gouvernementale de 70 $; au total, les donations dépasseront les 50 000 $. D’autres dons significatifs s’ajoutent en provenance de diverses institutions et communautés. Résultat : l’instance ressort de la catastrophe naturelle avec un surplus de 170 000 $, du jamais vu.

Cette somme inespérée  lui permettra d’avoir pignon sur rue sur Matton, et ce, au cours de la même année. «C’est indéniable. La crise nous a permis de rentrer dans nos locaux actuels et de réaliser mon fantasme d’avoir notre propre usine pour pouvoir en faire plus», résume M. Dunn.

L’immensité des lieux permettra le démarrage de deux entreprises d’économie sociale, soit le Magasin général et le Café des trois pommiers, finançant notamment l’achat de denrées offertes via le dépannage alimentaire. «C’est indéniable. On sait que ça n’a pas été le cas pour tout le monde, mais pour nous, la crise a été une planche de salut», conclut M. Dunn.

Alors que seulement quatre employés permanents œuvraient pour l’organisme sans but lucratif en 1998, ils sont désormais une quarantaine à y travailler, incluant ceux et celles prenant part à une initiative de réinsertion sur le marché du travail.