Robin-Bière Naturelle: d’apprentis brasseurs….à entrepreneurs

BIÈRE ARTISANALE. Les frères Mathieu et Hugo Noiseux Boucher brassaient déjà, plus jeunes, dans le sous-sol de leurs parents. Voilà que leur passion prend aujourd’hui une tout autre ampleur: les deux Montréalais derrière Robin-Bière Naturelle, une entreprise installée depuis peu à Waterloo, embouteilleront officiellement aujourd’hui, mercredi, leur toute première bière.

Dur à croire, en balayant du regard le vaste local de la rue Foster, anciennement l’ébénisterie BJR, que ce projet est issu d’une simple «joke» lancée il y a deux ans. C’est pourtant le cas: autrefois en poste dans un emploi manuel qui lui laissait tout le temps nécessaire pour rêvasser et réfléchir, Mathieu, qui détient une formation en design industriel, lance d’abord l’idée.

«Ça faisait longtemps qu’on disait qu’un jour, on allait se lancer une brasserie. Et là, c’était le bon moment, alors on a persisté dans la blague», admet-il en riant. Les étoiles semblent en effet alignées: son frère, qui œuvre comme chef cuisinier, était à ce moment entre deux emplois. Robin-Bière Naturelle, dont l’appellation fait référence au nom de famille d’une grand-tante paternelle, prend alors une tournure pour le moins sérieuse.

Les jumeaux Hugo et Mathieu Noiseux Boucher sont photographiés devant le local de Robin-Bière Naturelle, situé au 6547, rue Foster.

Résultat: leur microbrasserie, leur tout premier projet entrepreneurial, ouvrira d’ici quelques semaines. «Nos parents étaient très surpris de ça. Notre mère nous a demandé ça nous venait d’où, l’entrepreneuriat», avoue Mathieu avant de s’esclaffer.

Un ami y effectuant un stage leur parle de Waterloo; les jumeaux, qui ne souhaitaient pas lancer leur initiative à Montréal, où les microbrasseries se multiplient, y font un saut. Ils choisissent finalement la municipalité comme terre d’accueil de leur commerce. «On  voulait avoir une entreprise qui a une économie locale et être proche de nos producteurs de petits fruits dans le coin, mais aussi de nos consommateurs. On aime beaucoup les Cantons-de-l’Est», lance Hugo,  précisant que les Waterlois leur ont offert accueil local très chaleureux.

Les entrepreneurs de 32 ans ont acheté le bâtiment en décembre 2017  avant d’entamer des rénovations d’envergure. Ils ont officiellement mis la main, le 22 août précisément, sur leur permis de production. C’est le début officiel de leur production de bière artisanale, axée sur la fermentation et le vieillissement en tonneaux de bois.

«On travaille un peu plus notre bière comme du vin. On affine la bière en tonneaux de chêne ayant déjà contenu du vin, dans ce cas-ci du vin québécois qui vient majoritairement de la région des Cantons-de-l’Est», vulgarise Mathieu.

Ce procédé, qui peut s’étaler de trois à 24 mois (au lieu d’environ une semaine pour les bières dites régulières), amène pour sa part une modification du profil aromatique qui peut varier d’un tonneau à l’autre lors d’un même brassin.

Si la fermentation se fait dans leur propre «chai», le moût est préalablement brassé par Vrooden, située dans le parc industriel de Granby, puisque l’entreprise n’utilise pas à temps plein ses installations pour ses propres besoins. Pour les Noiseux Boucher, c’est non seulement l’occasion d’épargner sur des coûts exorbitants d’équipement de brassage et de cuves d’ébullition, mais également de tisser une belle collaboration avec une entreprise locale.

Les amateurs de bière pourront voir les locaux de Robin-Bière Naturelle de plus près; un salon de dégustation comprenant une vingtaine de places ouvrira ses portes à l’avant du bâtiment en janvier prochain. Les clients pourront également s’y procurer les bouteilles de 750 ml pour emporter.

Houblon, fleurs et conifères 

La toute première bière à être embouteillée, baptisée Léa,  est une Saison de blé à fermentation mixte, acidulée avec une très légère amertume de houblon et couleur paille. «Avec cette bière-là, on voulait faire une bière facile à boire, rafraîchissante […]», résume Mathieu, qui se consacre à temps plein à l’entreprise.

L’Achillée, leur deuxième création, est quant à elle une ambrée au côté malté plus proéminent où se marient fleurs d’achillée et pousses de conifères cueillies à Compton. Sans surprise, celle-ci possède un côté résineux et une touche florale. Cette deuxième mouture sera quant à elle embouteillée en décembre et pourra être goûtée par les passionnés au courant de la nouvelle année.

Des bières «vivantes»

Dans les deux cas, l’idée n’est pas de reproduire, année après année, le même goût; le tandem vise plutôt des produits évolutifs. «Ça se peut que ça change, admet Hugo, et nous, c’est ça qu’on embrasse. Ça nous fait plaisir d’avoir un produit vivant».

Pas question, non plus, de multiplier à outrance les boissons, l’entreprise waterloise privilégiant la qualité à la quantité. «La mode est à la nouveauté, mais nous on va un peu à l’encontre de ce mouvement-là. […] On veut plutôt faire des bières qui sont fiables», ajoute son frère.

Des déclinaisons des bières existantes comprenant différents petits fruits (argousiers, canneberges et framboises, par exemple) sont dans les cartons.

La Léa devrait être disponible le mois prochain dans les dépanneurs et épiceries spécialisés. Les deux entrepreneurs, qui visent d’abord et avant tout une vente locale, aimeraient par ailleurs voir leurs produits intégrer les cartes des restaurants. Un point de vente par grand centre est actuellement dans la mire des propriétaires.