De la formation et de la sensibilisation pour prévenir le profilage racial

PRÉVENTION. Les images de l’arrestation brutale de Georges Floyd survenue en mai 2020 à Minneapolis aux États-Unis ont fait le tour du monde. Une intervention hautement médiatisée qui s’est soldée par la mort de l’homme par asphyxie. Bien que Granby n’ait rien d’une grande métropole américaine, la communauté de 70 000 habitants ne doit pas se fermer les yeux face au profilage racial. Pour prévenir le phénomène, le service de police offre depuis un mois une formation pour sensibiliser les policiers et les policières aux réalités culturelles d’aujourd’hui.

Depuis les dernières années, aucun membre du Service de police de Granby (SPG) n’a fait l’objet d’une plainte en déontologie policière en lien avec le profilage racial. Dans un souci de prévenir des gestes répréhensibles qui pourraient être commis par des policiers, l’organisation a élaboré une formation à l’interne (rencontres, présentation de vidéos) afin d’outiller ses membres appelés à intervenir sur le terrain auprès notamment de la communauté immigrante. 

Entre le 26 avril et le 26 mai, c’est l’ensembe des policiers (patrouilleurs, sergents, enquêteurs, etc.) qui aura reçu sa formation vulgarisée par le relationniste au SPG, Guy Rousseau. «Pour moi, ç’a été une opportunité de faire une dernière tournée pour rencontrer tous les policiers du service pour leur parler du profilage racial et des compétences interculturelles (…). C’était des rencontres de quatre heures par petit groupe (3-4 personnes) et ça permettait d’avoir des échanges positifs et le pouls des policiers», a expliqué l’agent.

Avec plus d’une centaine d’ethnies sur son territoire, Granby n’a plus le portrait sociodémographique d’autrefois. Une nouvelle réalité avec laquelle doit composer les policiers et les policières du SPG qui demande aussi une période d’adaptation pour les immigrants qui, dans certains cas, craignent le pouvoir policier. «Les premières fois que j’ai participé à des rencontres avec le SERY (Solidarité ethnique régionale de la Yamaska); quand je m’assoyais à la table…les gens s’assoyaient à l’autre bout. Ç’a pris un certain temps avant que ces personnes puissent me connaître et me faire confiance», a indiqué l’agent Rousseau.

Au cours de sa formation, le relationniste du SPG invite également les policiers à prendre conscience des réalités culturelles et de l’importance de prendre le temps de créer un lien avec la personne immigrante pour briser les barrières lors d’une intervention. D’autres thèmes forgent en outre la formation, dont la vie privée et professionnelle, le profilage racial et criminel, les biais implicites et cognitifs, le désengagement policier et les politiques du service.

Travailler en amont

Très conscient de la perception des immigrants face aux policiers, le directeur général de SERY, Frey Guevara, a lui-même brisé cette bulle de verre en organisant des visites au quartier général destinées aux nouveaux arrivants. D’ailleurs, lors de notre passage au poste de police de la rue Simonds Sud, un groupe d’étudiants arrivés au pays depuis peu avait droit à leur tour guidé en compagnie d’un policier.

«C’est une journée de fierté pour moi de savoir que l’immigration est considérée comme un facteur important pour contribuer au développement social, culturel et économique de notre belle ville d’accueil.» «Depuis plusieurs années, le SERY collabore avec le service de police pour parler d’immigration et faciliter l’arrivée des nouveaux arrivants afin de créer un bon lien. L’immigration, c’est une responsabilité partagée», a rappelé M. Guevera.

De son côté, la mairesse Julie Bourdon s’est réjouie de voir l’organisation policière travailler en amont. «On est vraiment content que le service de police ait pris cette initiative qui rentre dans les valeurs de la Ville. Pour nous, c’est très important. On a tous des biais à différents niveaux et je pense que c’est important de s’en rendre compte et de travailler là-dessus, car on est tous des êtres humains.»

Pour élaborer sa formation, le SPG s’est imprégné des compétences et des connaissances du Service de police de Granby en matière de lutte au profilage. L’organisation s’est aussi abreuvée auprès des Services de police de Laval, de Gatineau et de la Sûreté du Québec.

«Oui, c’était des outils qu’on voulait donner aux policiers, mais force est de constater que ç’a amené de belles réflexions. Ç’a permis aux policiers de réfléchir sur leur comportement et de voir si des biais s’étaient infiltrés dans leur travail», a conclu la capitaine à la sécurité des milieux et relations communautaires au SPG, Caroline Garand.