Une multinationale espagnole pour gérer nos poubelles?
ENVIRONNEMENT. La filiale américaine de la multinationale espagnole Urbaser aurait l’œil sur les poubelles de la région. Un lobbyiste enregistré au registre québécois a inscrit Granby et la Haute-Yamaska parmi les organismes que l’entreprise souhaite approcher pour faire valoir son expertise dans la gestion de matières résiduelles.
Dans sa fiche enregistrée le 6 juillet sur le Registre des lobbyistes du Québec, Jean-Pierre Giasson, président de RADAR Écolotek, indique représenter la filiale américaine du groupe Urbaser. La multinationale, dont le siège social est situé à Madrid, se spécialise dans la gestion des matières résiduelles.
Parmi les institutions publiques visées par le mandat, on retrouve Granby et la MRC de la Haute-Yamaska. Cinq autres municipalités, deux MRC, deux CLD et plusieurs ministères figurent aussi sur la liste.
Toujours selon le document publié sur le registre, Urbaser souhaite faire valoir son expertise «en matière de conception, construction et opération d’installations de traitement de matières résiduelles, de biométhanisation et compostage de matières organiques».
Aucune rencontre
Bien que le lobbyiste mentionne vouloir tenir des rencontres, des communications écrites et des appels téléphoniques, il semble qu’aucune démarche n’ait encore eu lieu.
Ni le maire de Granby Pascal Bonin, ni le préfet de la MRC Pascal Russell n’étaient au courant de l’inscription de M. Giasson au moment où Granby Express les a interrogés.
«Toutes les personnes, tous les lobbyistes qui ont des demandes sont renvoyés au préfet automatiquement», a répondu le maire Bonin. Celui-ci dit avoir donné la consigne précise à son adjointe de renvoyer les demandes concernant le dossier des matières résiduelles à la MRC.
Même étonnement du côté de Pascal Russell qui dit n’avoir jamais entendu parler de cette entreprise ou du lobbyiste en question. De son côté, la procédure consiste à transmettre toutes les demandes au personnel technique de la MRC et à la direction générale.
«Une fois que l’entreprise a parlé au personnel technique, si on me dit oui, ce serait bien d’organiser une rencontre, là je vais les rencontrer», explique celui qui est aussi maire de Waterloo.
Beaucoup d’intérêt
Les deux élus n’étaient pas au courant de l’intérêt d’Urbaser, mais ils ne s’étonnent pas que le dossier attire l’attention. «Plus la date butoir approche, plus c’est pressant pour les compagnies d’avoir de l’information», indique Pascal Bonin.
D’après le préfet Russell, deux organismes publics courtisent déjà la Haute-Yamaska afin de récupérer son tonnage de matières résiduelles. Il s’agirait de la MRC Brome-Missisquoi et de la Société d’économie mixte de l’est de la couronne sud (SEMECS). Cette dernière regroupe la Vallée-du-Richelieu, Marguerite-d’Youville et Rouville.
Pour ou contre le registre des lobbyistes?
Pascal Bonin a profité de l’occasion pour émettre son opinion au sujet des procédures encadrant le lobbyisme. À son avis, tous les scandales dévoilés au cours des dernières années, ainsi que la Commission Charbonneau sur l’industrie de la construction, ont créé un climat de suspicion.
Cette perte de confiance a rendu l’encadrement des relations entre élus et entreprises privées très complexe. Le registre des lobbyistes en est un exemple. «Je trouve dommage qu’on se prive d’informations très pertinentes que le privé possède et qu’on ne peut plus avoir», partage-t-il.
De l’action cet automne
En avril dernier, la MRC Haute-Yamaska s’est pratiquement retrouvée à la case départ. Le conseil des maires a décidé d’abandonner l’appel d’offres en cours pour le choix de la technologie et de l’exploitant du futur centre de tri et de traitement des matières résiduelles.
Cette décision a créé une situation d’urgence puisque la MRC doit avoir déposé son nouveau plan de gestion des matières résiduelles (PGMR) avant le 31 octobre. Si ce n’est pas fait, l’organisme risque la perte de ses redevances sur l’élimination des déchets d’une valeur de 818 000$.
«On a eu des sessions, mais pour l’instant c’est les vacances d’été. Les discussions devraient reprendre vers la fin août», prévoit Pascal Bonin.