Pas toujours commode la production de l’or blond
AGRICULTURE. Une coulée au mois de février, des variations de température au cours d’une même journée, un sol plus ou moins gelé, des redoux, des froids sibériens, des chutes de neige moins abondantes. Pour les producteurs acéricoles, la production de sirop d’érable à l’ère des changements climatiques apporte son lot de défis qui les obligent à revoir leurs stratégies à tout moment durant leur saison des sucres. Une nouvelle réalité avec laquelle doivent composer les acériculteurs d’ici, a constaté le GranbyExpress.
«La saison a débuté plus tôt, on a manqué la première coulée», affirme d’entrée de jeu, Bruno Côté, de l’Érablière Familiale P. Bernier, de Shefford. Pour cette entreprise acéricole de 3500 entailles, cet imprévu causé par les hauts et les bas de la météo lui a évidemment fait perdre la précieuse eau d’érable vitale pour la production de l’or blond.
«Des coulées au début de février, ce n’est pas supposé être, mais est-ce que ça va devenir la nouvelle norme? À voir», soutient l’acériculteur. «Avec les changements climatiques, les saisons commencent plus tôt qu’à l’habitude. De notre côté, on ne l’a pas fait, mais il y a producteurs qui ont fait du sirop à l’automne et même à Noël», ajoute-t-il au passage.
Et d’une saison à l’autre, la récolte diffère selon l’influence de l’une ou l’autre des variables ci-haut mentionnées. Chose certaine, Bruno Côté et ses beaux-parents, Annie Lambert et Patrick Bernier, qui exploitent une érablière sur le chemin Bell, ne se feront plus surprendre par Dame nature. Du moins, ils l’espèrent. Le trio d’acériculteurs compte, entre autres, entailler leurs érables dès la fin du mois de janvier, l’an prochain.
L’arrivée de nouveaux insectes ravageurs, qui s’en prennent aux érables à sucre, n’est pas non plus exclue. Un autre souci de plus pour les acériculteurs. «On surveille beaucoup plus nos érables. Quand ils sont attaqués, on va les abattre pour sauver les autres. Ça nous demande une plus grande vigilance au niveau de la forêt», mentionne M. Côté.
Des projets freinés
À l’Érablière Familiale P. Bernier, 80 % de la production annuelle est transformée en produits de l’érable qui sont écoulés notamment dans les marchés publics et éphémères (Noël, Pâques, etc.). «De la tire, du beurre, du caramel à l’érable, on en fait. Mais on veut amener l’érable ailleurs avec des sauces BBQ, des sauces piquantes, des ketchups (…). On s’amuse avec l’érable et on pense que c’est une belle façon de le faire découvrir autrement avec des produits à valeur ajoutée », confie Bruno Côté.
Avec des rendements variables d’une saison à l’autre combiné à une économie au ralenti, les producteurs acéricoles ne l’ont pas facile eux non plus tout comme leurs confrères des autres productions agricoles. Un contexte symptomatique qui en pousse certains à remettre des projets d’investissement à plus tard. Pour le clan Bernier, qui aspire à ajouter d’autres items à sa gamme de produits, l’agrandissement de la salle de transformation sera bientôt nécessaire afin de répondre à la demande.
« On doit le faire cet investissement, mais avec l’incertitude économique, on a mis le pied sur le frein un peu. Pour grandir, on a de l’argent à investir (…). Quand tu reviens d’un marché en janvier avec 80 $ dans tes poches, toutes dépenses payées, tu dois de trouver des façons pour optimiser», indique l’acériculteur.
«Nos clients sont contents de nous voir lorsqu’on fait des marchés. Ils nous le rappellent…continuez votre bon travail. C’est notre motivation », avoue Annie-Lambert, copropriétaire de l’entreprise acéricole.