Le poids démographique se déplace d’est en ouest

CANADA. La population du Québec a franchi pour la première fois le cap des huit millions d’habitants, mais le poids démographique de la province au sein du Canada continue de reculer au fur et à mesure que la population se déplace vers l’ouest, selon les chiffres de Statistique Canada.

Au jour du recensement, le 10 mai 2016, le Québec comptait 8 164 361 habitants parmi les 35 151 728 du Canada. La population de la province a augmenté au cours de la période couverte par l’enquête, mais à un taux de croissance moindre que celui du reste du pays.

Entre 2011 et 2016, la population du Québec a ainsi enregistré une croissance de 3,3%, ce qui est inférieur à la moyenne nationale de 5% – et surtout, nettement en deçà de celui que revendiquent les trois provinces des Prairies.

Pour la première fois depuis qu’elles ont joint la Confédération, l’Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba ont affiché les croissances les plus élevées parmi les provinces canadiennes (11,6, 6,3 et 5,8%, respectivement), suivies de près par la Colombie-Britannique (5,6%).

«On remarque une forte croissance des trois provinces des Prairies. Il y a maintenant environ un Canadien sur trois qui vit dans l’Ouest», souligne en entrevue Johanne Denis, porte-parole de Statistique Canada.

En Alberta, où la bulle pétrolière des dernières années s’est brusquement dégonflée, «les causes de cette grande croissance ont été une immigration forte et une forte migration interne des gens qui partent d’autres provinces et qui vont s’établir là», précise-t-elle.

Il est difficile de dire si la ruée vers l’ouest se poursuivra si le prix du baril ne remonte pas.
Mais chose certaine, entre 2011 et 2016, ce nouveau paradigme a accentué le déclin du poids démographique du Québec. En 1966, plus du quart de la population (28,9%) résidait au Québec. Quarante ans plus tard, cette proportion est passée à 23,2%.

«La croissance du Québec est plus basse que la croissance nationale, et ce qu’on voit, c’est que la migration interne est plus faible, note Mme Denis. Il y a moins de personnes qui viennent s’établir au Québec que dans les provinces de l’Ouest.»

La population québécoise continue malgré tout de croître, ce qui n’est pas le cas de celle du Nouveau-Brunswick, seule province à afficher un déficit démographique. Entre 2011 et 2016, la population y a fléchi de 0,5%.

«Le changement observé dans le taux de croissance est lié à des pertes plus importantes au chapitre des migrations interprovinciales; des gens qui partent du Nouveau-Brunswick et vont s’établir ailleurs au Canada», explique la porte-parole de l’agence fédérale.

C’est le Nunavut qui remporte la palme de la plus forte croissance. Grâce à un taux de fécondité largement supérieur à la moyenne (2,9 enfants par femme comparativement à 1,6 à l’échelle nationale), le territoire créé en 1999 peut se targuer de compter (légèrement) plus d’habitants que le Yukon en 2016.

Les trois territoires septentrionaux demeurent cependant très peu densément peuplés. C’est près de la frontière avec les États-Unis que la vaste majorité de la population élit domicile: en 2016, deux personnes sur trois vivaient à moins de 100 kilomètres de ladite frontière.

Il faut dire que plusieurs agglomérations sont situées dans cette zone géographique qui ne représente que 4% de l’ensemble du territoire canadien. S’y trouvent notamment les trois centres urbains les plus peuplés au Canada, soit Toronto, Montréal et Vancouver.

Ces régions métropolitaines sont le lieu de résidence de plus du tiers (35,5%) des Canadiens. Toronto arrive première avec ses 5 928 040 habitants, suivie de Montréal qui, pour la première fois au recensement, dépasse la barre des quatre millions d’habitants.

La moitié de la population du Québec (4 098 927) s’agglutine dans la métropole et ses banlieues. Le taux de croissance de la population dans cette région, qui atteint 4,2%, est supérieur de 0,9% à la moyenne québécoise.

Le phénomène de l’étalement urbain est ici à l’œuvre, plusieurs municipalités situées près de la limite des couronnes de Montréal ayant montré des taux de croissance démographiques élevés entre 2011 et 2016.

Mais dans la région montréalaise comme ailleurs au pays, l’immigration joue aussi dans la balance.
«Les deux tiers de la croissance de la population sont dus à l’immigration, et on sait que les immigrants vont plus s’établir dans les grands centres», fait remarquer Johanne Denis. L’immigration «contribue beaucoup» à l’urbanisation grandissante du Canada, signale-t-elle.

On est cependant bien loin, à Montréal, d’avoir constaté une explosion démographique aussi fulgurante que dans les deux principales villes albertaines, qui dominent leurs rivales de partout au pays : la région de la ville de Calgary a enregistré une croissance de 14,6%, et celle de la capitale, Edmonton, de 13,9%.

À l’inverse, la région de la ville néo-brunswickoise de Saint-Jean s’est vidée de ses habitants. Entre 2011 et 2016, la population y a diminué de 2,2%, alors qu’elle avait pourtant enregistré un bond de 4,4% au cycle de recensement précédent, entre 2006 et 2011.

L’agence fédérale dévoilait mercredi matin les premières données brutes tirées du recensement réalisé en 2016, année qui marquait le retour du formulaire long obligatoire qui avait été aboli sous le précédent gouvernement conservateur.
Au cours des prochains mois, Statistique Canada révélera une série d’autres trouvailles concernant l’âge, la scolarité, l’immigration ou encore la langue, entre autres indicateurs, qui permettront de brosser un portrait de la société canadienne.