La valeur des terres agricoles en hausse de 181 % depuis 2010

AGRICULTURE. Le prix payé pour un hectare de terre en culture en 2018 a encore augmenté en Montérégie-Est, une région qui comprend la Haute-Yamaska. Les acquéreurs ont payé, en moyenne, plus de 36 100 $ l’hectare, un prix bien loin des 12 800 $ déboursés pour la même superficie en 2010. La valeur actuelle des terres en culture, qualifiée de problématique par l’UPA, rend difficile leur accès.

L’an dernier, 72 transactions ont été recensées par la Financière agricole du Québec (FADQ) en Montérégie-Est, soit 11 de plus qu’en 2017. Le prix moyen d’un hectare en culture en 2018 s’est fixé à 36 108 $ en Montérégie-Est, en hausse de 4,9% par rapport à l’année précédente.

À titre indicatif, le même hectare se transigeait 33 250 $ en 2016, 30 150 $ en 2015, 27 007 $ en 2014, 20 853 $ en 2013, 18 205 $ en 2012, 12 540 $ en 2011 et 12 842 $ en 2010. Entre 2010 et 2018, le prix à l’hectare a bondi de 181,17 %.

Dans l’ensemble de la province, l’hectare en culture s’est vendu en moyenne 22 962 $ en 2018 et se vendait 7531 $ en 2010, un écart de 204,9 %. Toutes ces données sont issues du bulletin annuel Transac-Terres produit annuellement par la FADQ.

Transactions

L’écart-type en Montérégie-Est était de 13 006 $ en 2018. «Il y a eu des transactions qui ont été autour de 23 000 $ ou 25 000 $ alors que d’autres ont atteint aisément les 50 000 $. On l’a d’ailleurs constaté dans nos interventions de financement», mentionne André Picard, vice-président au financement de la FADQ.

Règle générale, poursuit M. Picard, quand la valeur d’un hectare en culture avoisine les 35 000 $ ou 40 000 $, ce sont davantage des propriétaires d’entreprises qui en font l’acquisition pour augmenter leur propre superficie. «Comme la terre n’est pas un bien que l’on peut créer, l’expansion se fait par acquisition. C’est ce qui crée la rareté et qu’il y a une demande ferme au niveau des prix», précise André Picard.

Cette situation crée un écart entre la valeur économique et la valeur. «Le sol peut être très performant, propice à la production de céréales et de maïs-grain, mais le prix des céréales en Montérégie n’est pas différent de ce qui se transige dans le reste de la province. Souvent, pour payer les terres à ces prix, les producteurs amortissent le coût sur l’ensemble de leur propriété», ajoute M. Picard.

Le jeu de l’offre et de la demande   

Pour le président de l’UPA Haute-Yamaska, Jérôme Ostiguy, la flambée du prix des terres agricoles est multifactorielle. Une conjoncture qui tourmente le producteur laitier de Shefford.

«Les demandes pour la production animale, les prix des denrées reliés à la bourse américaine, l’accès à nos marchés par des étrangers (gestion de l’offre), le manque de main-d’œuvre et de relève font que les producteurs choisissent les grandes cultures (maïs, soya, céréales). Ça fait en sorte que ça augmente la demande pour les terres agricoles.»

Pris dans une spirale où la productivité et la quête de revenus supplémentaires font foi de tout, des agriculteurs sont prêts à mettre le paquet pour ajouter des parcelles de terre.

«Il n’y a pas 100 manières pour augmenter ou maintenir tes revenus. C’est de hausser tes surfaces cultivables», laisse entendre le porte-parole de l’UPA.

Et l’accès à des terres n’est plus ce qu’il est. Le règlement sur les exploitations agricoles empêche, entre autres, les producteurs de créer de nouvelles terres en raison des questions environnementales (bandes riveraines et zones inondables). «Le ministère de l’Environnement nous interdit d’agrandir nos terres. On n’a plus le droit de couper une forêt pour la mettre en culture. Donc ça fait une pression sur les terres déjà en culture», affirme M. Ostiguy.

Et la relève?

Bien que des MRC financent des fonds d’aide à l’établissement en agriculture, l’acquisition de terres à 36 000 $ l’hectare refroidit plusieurs jeunes intéressés, entre autres, à la production laitière, selon Jérôme Ostiguy.

«À 36 000 $ l’hectare, c’est beaucoup trop cher pour les jeunes et oui, ça m’inquiète», manifeste M. Ostiguy.

Sur le plan fiscal, des efforts devront aussi être faits du côté de Québec et des municipalités en ce qui a trait aux taxes foncières payées par les producteurs, exprime le producteur laitier. «Il faudrait mettre un taux maximal autant pour la valeur des terres que pour le taux d’imposition. Comme c’est là, c’est laissé au gré des municipalités.» <B>Avec la collaboration d’Éric Patenaude<B>.