«Ce n’est pas un contrat», dit Ottawa sur un arrangement de 81 ans avec McKinsey

OTTAWA — Le gouvernement de Justin Trudeau a tenu mardi à «corriger l’information» voulant qu’un contrat conclu avec McKinsey en 2019 ne viendrait à échéance que 81 ans plus tard, soit en 2100.

«Ce n’est pas un contrat. C’est plutôt un arrangement en matière d’approvisionnement», a précisé la présidente du Conseil du Trésor, Mona Fortier, durant la période des questions.

Elle a affirmé qu’«aucune entente monétaire» ne lie Ottawa à la firme de consultants dans le cadre de cet arrangement.

«C’est plutôt une présélection. (…) C’est une pratique de longue date qui permet au gouvernement d’économiser de l’argent et du temps», a ajouté Mme Fortier.

Elle a indiqué que des «centaines de fournisseurs» ont le même genre d’arrangement avec le gouvernement.

En soirée, le secrétaire parlementaire de la ministre de l’Approvisionnement, Anthony Housefather, a précisé que l’arrangement ne durera pas nécessairement 81 ans.

«La durée des arrangements en matière d’approvisionnement débute à la date d’attribution jusqu’au 31 décembre 2100 ou jusqu’à ce que le Canada choisisse de lancer un nouvel appel d’offres ou juge qu’il n’est plus nécessaire», a-t-il écrit sur Twitter.

Il a signalé que cette même durée est indiquée par Ottawa dans le cas de «tous les fournisseurs» ayant des «arrangements».

«(Cela) n’impose aucune obligation au gouvernement d’acheter des biens ou des services», a également soutenu M. Housefather.

Lundi, la députée bloquiste Julie Vignola a mentionné un «contrat ouvert» sur 81 ans en posant une question à l’un des premiers témoins entendus dans le cadre de l’enquête parlementaire sur les contrats accordés par Ottawa à McKinsey.

Elle demandait à Amanda Clarke, une professeure associée à l’École de politiques publiques et d’administration de l’Université Carleton, ce qui justifie selon elle qu’un accord s’échelonne sur autant de temps.

«À un moment donné, en 81 ans, je ne peux pas croire qu’on n’est pas capable d’avoir des spécialistes (à l’interne)», a-t-elle commenté.

Mme Clarke a répondu que l’idée d’un pareil contrat lui semblait «scandaleuse». L’avis d’attribution de «contrat» mentionné par Mme Vignola est accessible en ligne.

Sous l’en-tête «contrats octroyés», l’avis apparaît et on peut lire que l’accord a été conclu pour des services professionnels en informatique. À côté de l’indication «valeur totale du contrat», la somme de 0 $ figure.

«Notre gouvernement va continuer de maintenir des normes qui sont les plus élevées d’ouverture, de transparence et de responsabilité financière», a conclu Mme Fortier.

L’explication fournie par la présidente du Conseil du Trésor n’a pas semblé convaincre le député bloquiste Jean-Denis Garon. «Peu importe quel parti gouverne, ici, peu importe le choix des électeurs, McKinsey va encore être là (en 2100) sous contrat ou sous arrangement – comme dit la ministre – sans aucun mandat précis. Est-ce que c’est ça que l’on veut en démocratie?», a-t-il lancé.

L’enquête parlementaire sur les contrats accordés à McKinsey, menée par le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires, se poursuivra dans les prochains jours. Mercredi, l’ex-patron de l’entreprise, Dominic Barton, comparaîtra.

Selon les plus récentes données partagées par Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC), 116,8 millions $ ont été versés à McKinsey depuis 2015, en vertu de contrats conclus par ce ministère.

«Les données sur des contrats sont un arrêt sur image et sont sujettes à des changements», avait expliqué SPAC dans une déclaration écrite, la semaine dernière.