Des médecins croient que la fumée des incendies de forêt peut nuire à la grossesse

La fumée dégagée par les incendies de forêt qui ont ravagé l’ouest canadien récemment et qui font présentement rage en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick incite des médecins à avertir les femmes enceintes de prendre des précautions supplémentaires contre l’inhalation de particules toxiques.

La docteure Wee-Shian Chan, cheffe de la médecine au BC Women’s Hospital, affirme que respirer des polluants et des gaz toxiques générés par les incendies de forêt entraîne des particules dans la circulation sanguine et les poumons, ce qui rend la respiration plus difficile.

«Lorsque les femmes sont exposées à des incendies de forêt, cela pourrait avoir un impact sur la croissance du bébé», selon la Dre Chan. Elle ajoute que la recherche n’a pas encore déterminé si la fumée interfère avec le développement normal du fœtus, car les femmes enceintes ne peuvent pas y être exposées pendant fins d’études.

« Les femmes doivent juste être vigilantes », insiste-t-elle. « Si les femmes enceintes sont sujettes à l’asthme, cela peut également déclencher des bronchospasmes ou des quintes de toux et des problèmes respiratoires, ce qui ne serait pas non plus une bonne chose pendant la grossesse. »

La Dre Chan conseille aux femmes enceintes de rester à l’intérieur, d’utiliser un purificateur d’air portable avec un filtre certifié et de boire beaucoup d’eau. Selon la qualité de l’air, ils doivent également porter un masque N95 à l’extérieur ou quitter le secteur, si nécessaire.

Une étude co-écrite par Matthew Adams, chercheur à l’Université de Toronto à Mississauga, conclut que la fumée des feux de forêt peut affecter le premier trimestre de la grossesse, augmentant le risque de faible poids à la naissance chez les bébés nés à terme.

L’étude, publiée l’année dernière dans le Lancet Regional Health Americas et impliquant également des chercheurs du Brésil, du Danemark et des États-Unis, a estimé que la région sud du Brésil avait une augmentation de près de 19% du faible poids à la naissance en raison de l’exposition à la fumée des feux de forêt au cours du premier trimestre. Les chercheurs ont étudié 1,6 million d’actes de naissance à travers le Brésil entre 2001 et 2018 et ont analysé la fumée des feux de forêt qui s’est produite tout au long de cette période.

Cependant, cette étude contredit les conclusions d’autres recherches, notamment celle de Suzanne King, professeure de psychiatrie à la retraite mais toujours active à l’Université McGill, après de multiples catastrophes naturelles telles que l’incendie de forêt de 2016 à Fort McMurray, en Alberta, et crise du verglas de 1998 au Québec, où des millions de personnes se sont retrouvés sans électricité, certains pendant plus d’un mois.

« Nous voulions vraiment trouver quelque chose, mais nous n’avons trouvé aucun effet, pas même lorsque nous avons essayé d’estimer le nombre de jours sans électricité, aucun effet », de relater Mme King.

Dans l’ensemble, ajoute-t-elle, les femmes enceintes ne devraient pas se blâmer pour tout ce qui échappe à leur contrôle à propos du comportement ou des problèmes physiques des enfants nés pendant ou après un incendie de forêt ou une autre catastrophe. « S’il y a un effet sur l’enfant, c’est probablement plus parce que votre maison a brûlé que parce que vous étiez contrariée parce que votre maison a brûlé. »

Le Dr David Olson, professeur d’obstétrique et de gynécologie à l’Université de l’Alberta, a mené une étude sur le stress émotionnel auquel les femmes enceintes ont été confrontées lors de l’évacuation par un incendie de mai 2016 à Fort McMurray, dans le nord de l’Alberta. 

Il a observé qu’environ 80 % des quelque 300 participants ont déclaré que l’évacuation n’était pas leur pire expérience, mais qu’elle avait déclenché d’autres traumatismes qu’ils avaient subis, tels que des abus ou la mort d’un conjoint ou d’un enfant.

« Les femmes enceintes qui traversent une catastrophe comme celle-ci peuvent certainement bénéficier d’un soutien », selon le Dr Olson, qui ajoute que les responsables qui gèrent les centres d’évacuation devraient s’assurer que les femmes enceintes restent avec leur famille et bénéficient du soutien d’amis et d’un travailleur social si nécessaire.

Le Dr Olson affirme que les femmes enceintes qui ont été forcées de quitter leur domicile à l’approche des flammes étaient confrontées à une accumulation de stress qui a conduit à l’anxiété et à la dépression chez certaines, en particulier celles ayant des antécédents de traumatisme.

Les responsables de la santé publique devront mettre davantage l’accent sur le traitement des problèmes de santé mentale, pas seulement sur les problèmes physiques causés par la fumée lors des incendies de forêt, qui ne manqueront pas d’augmenter en raison du changement climatique, selon David Olson.