Les Communes réclament une enquête sur les profits des chaînes d’épicerie

OTTAWA — La Chambre des communes a réclamé lundi à l’unanimité que le Bureau de la concurrence mène une enquête sur les profits des chaînes de marchés d’alimentation.

La motion du Nouveau Parti démocratique (NPD) réclamait également que soient alourdies les sanctions pour la fixation des prix et que les lois sur la concurrence soient durcies afin d’interdire aux entreprises d’abuser de «leur position dominante dans un marché pour exploiter les acheteurs ou les producteurs agricoles».

En entrevue après le vote, le chef adjoint du NPD, Alexandre Boulerice, s’est réjoui d’une «une belle victoire» en ayant «forcé» les conservateurs et les libéraux à «voir la réalité» et à «s’entendre sur des solutions».

«On a mis le doigt sur un problème qui est réel, a-t-il dit. Tout le monde pendant l’Action de grâces parlait du prix des aliments, du coût de l’épicerie, des choix difficiles que les gens doivent faire avec la « séraphinflation » et le fait que les grandes compagnies font des profits records en même temps que les gens doivent payer beaucoup plus cher pour manger.»

Les néo-démocrates veulent que le gouvernement s’attaque à «la cupidité» des entreprises du secteur des épiceries. Le parti les accusait d’ailleurs de «cupidiflation» dans le texte de la motion, un autre mot-valise visant à leur attribuer une partie du blâme pour l’inflation.

Le NPD est sur le cas des épiciers depuis des semaines. C’est à son initiative que le comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire a décidé il y a deux semaines qu’il se penchera prochainement sur l’inflation dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire et l’augmentation du coût des produits d’épicerie. Il examinera notamment les profits des grandes chaînes d’épiceries par rapport aux salaires des employés et au coût des produits d’épicerie au pays.

Les grands patrons des chaînes d’épiceries seront invités à témoigner de même que des économistes, des syndicats et des agriculteurs.

«Clairement grâce à nos efforts»

Plus tôt en journée, le chef du NPD, Jagmeet Singh, a attribué à sa formation le mérite du gel des prix annoncé par Loblaw sur ses produits de marque Sans Nom.

«C’est clairement grâce à nos efforts qu’on a forcé les grandes entreprises d’épicerie à évaluer leurs prix parce qu’on a dit qu’on va enquêter», a-t-il fanfaronné lors d’une conférence de presse au parlement. 

L’exemple du plus grand détaillant en alimentation du Canada prouve, a-t-il soutenu, que le NPD «a raison» lorsque ses députés s’époumonent à répéter que les grandes chaînes d’épicerie ont le pouvoir de «fixer ou déterminer le prix de la nourriture», que le gouvernement doit jouer un rôle pour les forcer à les réduire et qu’une enquête est nécessaire sur la façon dont ils sont déterminés.

M. Singh n’a d’ailleurs pas manqué de rappeler que des entreprises, dont les trois plus grandes chaînes d’épiceries du Canada, s’étaient entendues pendant des années pour fixer le prix du pain, selon le Bureau de la concurrence, qui estimait qu’elles s’étaient comportées comme des criminels.

M. Singh n’a toutefois pas voulu qualifier l’annonce de Loblaw de «victoire» et a même estimé que ce n’est «pas suffisant» puisque les prix en question ont été gelés à «un prix d’inflation».

Tôt lundi, Loblaw a annoncé qu’elle gèlera les prix des produits de marque Sans Nom, soit plus de 1500 articles d’épicerie, jusqu’au 31 janvier en expliquant que l’inflation alimentaire fait monter en flèche les factures d’épicerie.

Le président de Loblaw, Galen G. Weston, a mentionné dans un message que le prix d’un panier moyen d’épicerie a augmenté d’environ 10 % cette année et a affirmé que les augmentations de prix sont généralement raisonnables et découlent de l’augmentation des coûts de base pour les fournisseurs.

À ceux qui croient que c’est un peu simple de pointer les chaînes d’épicerie alors que l’inflation les force elles aussi à augmenter les salaires qu’elles versent et qu’elles paient plus cher les produits qu’elles revendent, M. Singh répond que les producteurs et les travailleurs ne sont pas payés davantage.

«Dans ce cas où les travailleurs n’ont pas reçu une grande augmentation de leurs salaires, les producteurs n’ont pas vu aussi une même augmentation de l’argent qu’ils reçoivent (…) avec des profits élevés des grandes entreprises d’épicerie et les grands bonus que les PDG ont reçus, ça nous montre qu’il y a quelque chose qui se passe», a-t-il déclaré.