Les qualités humaines de Guy Lafleur font l’unanimité parmi ses pairs et admirateurs

MONTRÉAL — Parmi les nombreux témoignages qui ont afflué après le décès de Guy Lafleur, un revenait fréquemment: l’ex-légende du Canadien de Montréal sera toujours vivante dans la mémoire collective des Québécois. C’est tellement vrai que Richard Martel avait de la difficulté à lui rendre hommage au passé, mardi matin.

Ancien entraîneur-chef pendant 18 ans dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec, maintenant député fédéral de Chicoutimi-Le Fjord, Martel a été l’une des nombreuses personnalités publiques, de toutes les sphères de la société, à se présenter à la cathédrale Marie-Reine-du Monde, à Montréal, pour assister aux funérailles de Lafleur.

Contrairement à de nombreuses autres de ces personnalités qui ont partagé les mêmes patinoires et le même vestiaire que Lafleur durant les années 70 et 80, Martel n’a jamais obtenu une aide sur l’un des 560 buts du «Démon blond» en saison régulière, ni profité de la générosité de l’ancien ailier droit pour lui-même trouver le fond du filet dans la Ligue nationale de hockey.

Toutefois, il a été tellement conquis par le style de Lafleur qu’il a changé d’allégeance.

«Je suis né en 1961. En 1970, les Bruins de Boston ont gagné la coupe Stanley et Bobby Orr était mon idole. Après ça, Guy Lafleur apparaît, Boston ne gagne plus, le Canadien gagne et Guy Lafleur est aussi électrisant que Bobby Orr. C’est rendu que je ne vis que pour le Canadien, que pour Guy Lafleur. Ç’a été des années extraordinaires. Je l’ai suivi tout le long, et quand Guy Lafleur était blessé, je n’écoutais pas le Canadien. Et quand il est parti, je n’écoutais plus le Canadien», a raconté Martel.

Puis, lorsqu’il a enchaîné avec ses souvenirs de Guy Lafleur, l’homme, Martel s’est surpris à en parler au présent.

«L’autre chose, c’est une personne – je dis encore « c’est une », j’ai de la difficulté à dire « c’était » – c’est une personne extraordinaire.

«On dirait que dès que tu lui parlais, c’est comme si tu faisais partie de sa famille. Il te reconnaissait à chaque fois, il était toujours gentil.

«Il est calme. Il nous regarde droit dans les yeux, il nous parle», a poursuivi Martel, en revenant au présent.

«C’est paisible quand tu parles avec. Et il nous écoute. Il ne prend pas la parole en premier, bien souvent. On se sentait confortable chaque fois qu’on parlait avec.»

Un modèle

Les premières personnalités ont commencé à faire leur arrivée sur le parvis un peu avant 9h30, soit quelque 90 minutes avant que ne s’amorce la cérémonie.

L’un d’eux était Gaétan Lefebvre, l’ancien soigneur du Canadien qui s’est joint à l’organisation montréalaise au début des années 70, à l’époque où Lafleur en était encore à ses débuts dans la LNH.

Ce n’est sans doute pas étonnant qu’il ait été parmi les premiers à arriver quand on sait que Lafleur avait lui-même l’habitude d’être le premier joueur à se présenter au Forum.

«C’est 50 ans de ma vie. Je l’ai connu en 1973, et c’est un monsieur qui venait me chercher à l’école secondaire pour être capable d’ouvrir le vestiaire à 16h pour être capable de jouer au backgammon pendant une heure de temps. Un « kid » de Pointe-Saint-Charles qui a Guy Lafleur comme chauffeur… Il a joué un grand, grand rôle dans ma vie. La personne que je suis aujourd’hui, il en a un gros crédit», a témoigné Lefebvre, les trémolos dans la voix et visiblement ému.

Larry Robinson, membre du fameux «Big Three» lors de la dynastie du Canadien de la fin des années 70, a aussi fait allusion à cette habitude de Lafleur de se présenter hâtivement à l’amphithéâtre. En y ajoutant quelques détails.

«Il était le premier arrivé. Il devait être 16h30, il avait probablement enfilé son uniforme, fumé quatre ou cinq cigarettes, bu cinq ou six tasses de café. Mais c’était comme ça qu’était Guy. Il adorait le sport. C’est probablement l’une des choses qui ont fait que lui et moi avons joué si longtemps: on adorait jouer à ce jeu. Et c’était un jeu. Il va vraiment me manquer», a ajouté Robinson après une pause de quelques secondes, très ému.

Dans les hommages qu’il a rendus à Lafleur sur le parvis de la cathédrale, Lefebvre a insisté sur l’humilité de l’ancienne grande vedette du Canadien.

«Probablement la star la plus humble que quelqu’un puisse s’imaginer. C’était tellement beau que les gens vont penser qu’on en invente, qu’on en met. Après un match, il avait marqué trois ou quatre buts, il pouvait se lever dans l’avion et faire le service et dire aux hôtesses « reposez-vous, vous avez une longue journée ». Ça, c’était Guy Lafleur.»

Selon Lefebvre, Lafleur aura été un modèle pour tout le Québec.

«Tu n’oublies pas tes origines, tu aimes les gens autour de toi, tu aimes ta patrie, tu aimes ton peuple. Guy, c’est un gars de gang. Son royaume à lui, c’était le vestiaire, et la patinoire, c’était son « stage ». Quand il était dans le vestiaire, on était entre les « boys ». C’est là qu’il a fait des conneries, des niaiseries pour détendre l’atmosphère. Mais c’était ça, Guy Lafleur.»