L’essentiel des fonds récoltés par le «convoi de la liberté» n’a jamais été dépensé

OTTAWA — La commission Rouleau a déterminé que la plus grande partie des millions de dollars recueillis par le «convoi de la liberté» l’hiver dernier se sont retrouvés dans un compte séquestre ou ont été retournés aux donateurs.

La Commission sur l’état d’urgence a enquêté sur le sort des quelque 25 millions $ de contributions versées par des donateurs via des transferts électroniques, des cryptomonnaies et des plateformes de sociofinancement.

Un rapport d’enquête publié jeudi par la commission montre qu’environ un million de dollars de cette somme ont été effectivement dépensés par différents organisateurs du convoi.

L’un des organisateurs a expliqué à la commission, dans une entrevue avant les audiences publiques, qu’environ 20 000 $ en espèces étaient distribués chaque jour de la manifestation aux camionneurs, souvent dans des enveloppes de 2000 $. 

Mais sur les 25 millions $ récoltés au total, environ 18 millions $ ont été retournés aux donateurs, et le reste a été gelé et placé dans un compte séquestre, en attendant les procès au civil, indique la commission.

Les 6,2 millions $ actuellement sous séquestre proviennent principalement de la collecte en ligne créée par Tamara Lich, l’une des principales organisatrices de la manifestation, et de la cryptomonnaie saisie par les autorités.

Les efforts de sociofinancement menés par Mme Lich ont permis de collecter à eux seuls près de 10,1 millions $ auprès de plus de 120 000 donateurs, avant que la campagne ne soit suspendue par la plateforme GoFundMe et que les dons soient finalement restitués.

Plus de 12 millions $ ont été par ailleurs collectés via la plateforme GiveSendGo. Le rapport de la commission indique que la majorité de ces dons ont été depuis remboursés.

Environ 800 000 $ de dons en cryptomonnaies ont été versés par des donateurs. Près de la moitié de ce qui a été collecté a été placé sous séquestre entre le 7 et le 22 mars, mais les autorités n’ont pas été en mesure de récupérer le reste.

Un OSBL pour déposer les fonds

Selon un résumé d’une entrevue avec Chad Eros, le trésorier du «convoi de la liberté», l’idée de créer un organisme à but non lucratif pour accepter les dons est venue de l’ex-député du Parti conservateur du Canada Russell Hiebert.

M. Eros a participé à la création de l’organisme «Freedom 2022 Human Rights and Freedoms» pour collecter les dons plutôt que de continuer à les déposer sur le compte bancaire personnel de Mme Lich. Il a également travaillé avec le cofondateur et directeur des finances de GiveSendGo, Jacob Wells, pour établir une collecte sur cette plateforme.

Parce que les organisateurs du convoi avaient du mal à ouvrir leurs propres comptes bancaires pour collecter des dons, M. Wells a alors accepté d’utiliser ses propres services de traitement des paiements, promettant de transférer les fonds aux organisateurs.

Keith Wilson, un avocat qui travaille auprès du Centre juridique pour les libertés constitutionnelles, qui soutenait les organisateurs, a accepté d’utiliser son propre compte en fiducie pour percevoir les dons au Canada. Mais un processeur de paiement a empêché l’argent d’être transféré sur le compte en fiducie de Me Wilson et une injonction civile a finalement empêché tout transfert des fonds.

La commission a également enquêté pour savoir si ce financement provenait de sources étrangères. Elle a constaté que 86 % des dons à la campagne principale sur GoFundMe provenaient du Canada et 11 % des États-Unis.

Sur les près de 10 millions $ US recueillis grâce à la campagne principale GiveSendGo, 47 % provenaient du Canada et 47 % des États-Unis. Selon les informations fournies par GiveSendGo, la campagne «Freedom Convoy 2022» comptait 113 152 donateurs.

Plus de la moitié des dons à cette campagne — 59 % — provenaient des États-Unis et environ 35 % du Canada. Plus de 6300 dons, représentant plus d’un demi-million de dollars, sont venus d’autres pays.