Viol collectif: les Communes réclament une enquête sur Hockey Canada

OTTAWA — Les élus de la Chambre des communes ont réclamé mercredi à l’unanimité une enquête indépendante sur la façon dont Hockey Canada a géré une affaire de viol collectif allégué quelques heures après qu’Ottawa eut annoncé qu’il gèle le financement de l’organisation.

Une motion présentée par le bloquiste Sébastien Lemire a été adoptée par consentement unanime entre les partis.

Le texte de la motion précise aussi que l’enquête devrait permettre de «savoir s’il s’agissait d’un événement isolé ou s’il existe des lacunes dans la façon dont Hockey Canada traite les plaintes d’agressions sexuelles, de harcèlements sexuels et d’autres types d’inconduites qui lui sont rapportées».

«Ce qu’a fait Hockey Canada de banaliser ce qui s’est passé est tout à fait inacceptable. (…) Ce qu’on a entendu, c’est que notamment c’était volontaire de la part des joueurs de participer ou non» à l’enquête, a commenté M. Lemire après la période des questions.

La ministre des Sports, Pascale St-Onge, a indiqué que des travaux sont en cours pour déterminer quel est «le bon processus pour procéder et faire respecter la motion».

Des révélations ont récemment permis de savoir que Hockey Canada avait conclu une entente à l’amiable avec une victime alléguée d’agression sexuelle par huit joueurs juniors de la Ligue canadienne de hockey.

Dans les documents de cour, la jeune femme allègue que les événements se sont produits dans une chambre d’hôtel après un gala de Hockey Canada en juin 2018, à London en Ontario.

Financement gelé

Plus tôt en après-midi, lors d’une autre mêlée de presse dans le foyer de la Chambre des communes, la ministre St-Onge a qualifié les témoignages livrés lundi par des dirigeants de l’organisation en comité parlementaire d’«extrêmement troublants et préoccupants».

Elle a expliqué que Hockey Canada ne verra son financement rétabli qu’une fois qu’elle aura rempli deux conditions.

La première est de transmettre à Sport Canada le rapport du cabinet d’avocats embauché pour enquêter sur l’incident allégué et un plan qui détaille comment seront mises en œuvre les recommandations au sein de l’organisation.

La seconde est d’adhérer au Bureau du Commissaire à l’intégrité dans le sport et de travailler «en étroite collaboration pour changer la culture du silence et (…) lutter contre les violences sexuelles au sein de l’organisation».

Actuellement, le leadership de l’organisation est «déficient, inapproprié, d’une autre époque», a-t-elle résumé.

Lundi soir, à la suite de la comparution de hauts dirigeants de l’organisation, Mme St-Onge avait soutenu qu’«on est face à une organisation qui perpétue la culture du silence».

À ce moment, elle avait refusé de dire si elle entendait retenir des fonds publics ou si des têtes devaient rouler tant qu’elle n’a pas reçu les conclusions de l’audit financier qu’elle a commandé.

Le porte-parole conservateur en matière de sports, Richard Martel, a dit être lui aussi «extrêmement préoccupé» par la façon dont Hockey Canada traite les plaintes d’agression sexuelle. «Ce n’était pas du tout convaincant», a-t-il lancé.

«Je me pose aussi des questions sur les hauts dirigeants de Hockey Canada parce que c’est une situation vraiment préoccupante surtout lorsqu’on sait qu’ils sélectionnent les meilleurs joueurs de chaque équipe, bien souvent les capitaines qui (…) seraient supposés avoir du leadership, de la discipline et de la responsabilité», a-t-il ajouté.

Appelé à réagir, le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, a salué le travail de la ministre St-Onge.

«Il n’y a pas grand monde à qui l’on décerne les méritas, mais je pense sincèrement pour avoir vu plusieurs des interventions de Mme St-Onge (…) qu’elle est orientée vers les bonnes décisions», a-t-il dit.

M. Blanchet a ajouté que la population doit savoir ce qui s’est produit et a accusé les responsables de Hockey Canada d’avoir donné lundi «un spectacle de relations publiques gênant» qui dénotait «un grave manque de respect pour les parlementaires».

Le député néo-démocrate Peter Julian a pour sa part estimé qu’Hockey Canada n’a pas mis en place le nécessaire pour que se tienne une enquête qui va «au fond des choses».

Lors de la comparution devant le comité permanent du patrimoine, le chef de la direction de l’organisation, Tom Renney, a assuré que Hockey Canada n’a pas tenté de «balayer sous le tapis» l’histoire par une opération de camouflage.

Plusieurs députés ont fortement réagi en apprenant qu’il était cependant facultatif pour les joueurs de l’équipe nationale junior de 2018 qui auraient été impliqués dans une affaire de viol collectif de participer à l’enquête sur les événements.

Hockey Canada a reçu 14 millions $ d’Ottawa en 2020 et 2021, dont 3,4 millions $ en subventions liées à la COVID-19, selon les documents gouvernementaux obtenus par CBC et TSN.