Épandage de Phoslock dans le lac Bromont: une première au Québec

ENVIRONNEMENT. Le projet de restauration du lac Bromont a récemment pris son envol, avec le lancement de l’épandage de 174 tonnes de Phoslock, un produit en provenance d’Australie utilisé pour la première fois au Québec.

Débutée le 25 octobre, cette opération a fait l’objet d’une démonstration publique, samedi, à laquelle les citoyens étaient invités. L’arrivée de cette nouvelle substance vise à inverser une tendance fortement médiatisée en 2006, mais constatée chaque année, c’est-à-dire la prolifération des cyanobactéries à l’origine des algues bleu-vert.

La professeure émérite du Département des sciences biologiques, Dolors Planas, et Claire Vanier, du Service aux collectivités de l’Université du Québec à Montréal (UQÀM) ont été sollicitées à cette époque afin de se pencher sur cette problématique. Ce partenariat  a permis de poser un diagnostic et de mettre de l’avant des recommandations spécifiques à ce cours d’eau.

«Ce que la recherche a démontré, c’est que la problématique principale, c’est le phosphore contenu dans les sédiments, au fond du lac.[…] Cette accumulation a fait en sorte que maintenant, la charge interne de phosphore du lac est tellement importante que c’est principalement elle qui est la cause de l’efflorescence de cyanobactéries», explique Anne Joncas, présidente de l’Association de conservation du bassin versant du lac Bromont (ACBVLB).

Le Phoslock, la solution jugée la plus sécuritaire pour l’environnement et la santé humaine, s’est ainsi imposé comme la plus prometteuse. Il s’agit d’une substance formée de granules d’une argile, la bentonite, à laquelle est chimiquement fixé le lanthane, un métal non toxique. Celui-ci capte de façon permanente le phosphore, tant dans la colonne d’eau  lorsqu’il est appliqué que dans les sédiments. «La couche de Phoslock va se déposer comme une couverture par-dessus les sédiments. Chaque fois que le phosphore va être libéré par un processus appelé le largage, il sera immédiatement trappé par le lanthane», précise Mme Joncas.

Prévention et grands espoirs

Le lac Bromont, bénéficiant du plus important épandage de Phoslock à ce jour effectué en Amérique du Nord, fait actuellement l’objet d’un projet-pilote approuvé par le ministère de l’Environnement. Mais comme les êtres humains, les lacs diffèrent. Ce produit n’est donc «pas un remède à tous coups», rappelle la biologiste, qui se dit néanmoins confiante de son succès. Appliquée à ce jour à environ 200 reprises à travers le monde, cette solution a éradiqué la problématique dans environ neuf cas sur dix.

«Le taux de succès est excessivement intéressant. Ce qui est le plus important pour la réussite du projet, c’est qu’il faut cesser d’apporter du phosphore au lac», vulgarise Mme Joncas. Cette dernière précise que les activités agricoles, l’érosion, les fosses septiques ou le déboisement sont notamment des sources de phosphore. En ce sens, les efforts des deux municipalités situées dans le bassin versant, Bromont et Lac-Brome, ainsi que ceux de leurs citoyens seront certainement corollaires du succès de l’opération, croit la bénévole.

À la demande du provincial, un protocole post-traitement a été élaboré pour les dix prochaines années afin de mesurer les impacts et l’efficacité de cette technique de restauration. Au moment d’aller sous presse, l’épandage de Phoslock était toujours en cours et mais avait dû être temporairement suspendu dû aux conditions météorologiques. Plus de 80 tonnes du produit avaient déjà été déversées dans le lac. Le coût du processus total, estimé à 650 000 $, a entièrement été assumé par la Ville de Bromont. Des employés municipaux du Service des travaux publics sont également mis à pied d’oeuvre dans le cadre de l’application.