Réforme à la SAAQ: à quand la même chose pour les victimes du travail?

J’ai appris récemment qu’avec le dépôt du projet de loi 22 visant à bonifier certaines prestations offertes par la SAAQ, le gouvernement reconnaît enfin l’existence de l’injustice qui affecte les personnes accidentées ayant bénéficié d’une indemnité de remplacement du revenu au moment de leur retraite.  Malheureusement, je constate que le projet de loi du ministre Bonnardel ne compensera cette injustice que pour les accidentés de la route, laissant les autres tels que les victimes du travail continuer de s’appauvrir à la retraite.

Il y a plusieurs années, j’ai moi-même été victime d’un grave accident de travail qui m’a laissé avec des séquelles.  J’ai été en arrêt de travail complet pendant une longue période de temps.  Les indemnités pleines que la CNÉSST m’a versées durant mon arrêt de travail complet correspondaient à 90% de mon revenu net.  Elles ont été calculées en retranchant notamment les cotisations que j’aurais dû payer au Régime de rentes du Québec.  Or, rien n’a été réellement versé à Retraite Québec qui calcule ces périodes comme non travaillées. 

Actuellement, je reçois toujours des indemnités de remplacement du revenu réduites.  Encore une fois, aucun montant n’est versé à Retraite Québec. C’est vraiment problématique, car au moment de ma retraite dans moins de 2 ans, ma rente sera établie sur la base d’une moyenne de mes gains en carrière.  Comme j’ai été des années sans pouvoir travailler, tous ces mois seront calculés comme des cotisations à zéro.  Cela va donc réduire considérablement ma moyenne de gains, et je n’aurai qu’un infime montant à ma retraite.  Je ne suis pas le seul dans cette situation, des centaines de milliers de victimes d’accidents ou de maladies du travail sont aussi pénalisées de la sorte au moment de prendre leur retraite. 

Je me réjouis que le gouvernement reconnaisse qu’il y a une injustice en déposant le projet de loi 22.  Mais c’est choquant de constater que seuls les accidentés de la route bénéficieront d’une mesure de correction.  Pourquoi le gouvernement ne corrige pas la même injustice que subissent tous les bénéficiaires d’indemnités de remplacement du revenu?  Les victimes d’actes criminels et les victimes d’accidents et de maladies du travail subissent pourtant exactement la même injustice.

Pour les victimes, comme moi, d’un accident ou d’une maladie du travail, c’est d’autant plus inacceptable que le ministre du Travail, Jean Boulet, vient tout juste de réformer la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.  À aucun moment, le ministre Boulet n’a envisagé, dans sa réforme, des bonifications des prestations comme celles que le projet de loi 22 prévoit pour les accidentés de la route.

Combien de temps laissera-t-on les victimes du travail s’appauvrir à la retraite?  Pourquoi une injustice qui requiert une correction à la SAAQ serait tolérable à la CNÉSST?  À quand une correction de la situation pour l’ensemble de toutes les victimes?  Le ministre Boulet et l’ensemble du gouvernement nous doivent des explications.

Roger Lavoie

Granby