Travailleurs étrangers temporaires: 97 constats d’infraction remis à 11 entreprises

QUÉBEC — Les dénonciations d’abus vécus par des travailleurs étrangers temporaires ont mené la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail (CNESST) à émettre 97 constats d’infraction à 11 entreprises en 2023.

Cette information a été dévoilée mardi par la présidente-directrice générale de la CNESST, Manuelle Oudar, lors d’une conférence de presse à Québec en compagnie du ministre du Travail, Jean Boulet.

Mme Oudar et M. Boulet ont dressé le bilan des gestes posés par la CNESST cette année pour mieux protéger les travailleurs étrangers temporaires qui sont «vulnérables» et «méconnaissants des normes du travail». 

Au Québec, le nombre de travailleurs étrangers temporaires a triplé depuis 2015, pour atteindre 38 500. Autrefois associés à l’agriculture, ils sont présents dans le secteur manufacturier, l’hôtellerie, l’hébergement, le commerce de détail et la transformation alimentaire. 

Ils ont les mêmes droits et obligations que tout autre travailleur québécois, a rappelé M. Boulet, révélant que l’entreprise Bombardier Produits Récréatifs, accusée de sous-payer ses travailleurs mexicains, avait reçu 41 des 97 constats d’infraction cette année.

En 2022, la CNESST n’avait émis au total que 14 constats d’infraction.

Interrogé à savoir si le programme des travailleurs étrangers temporaires était de «l’esclavage moderne», comme l’a dénoncé le rapporteur spécial des Nations unies Tomoya Obokata, M. Boulet a déclaré qu’il y avait «place à amélioration».

Il a rappelé qu’en septembre, son gouvernement a chargé la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT) d’évaluer l’impact du permis de travail dit «fermé» sur le marché du travail québécois et sur les travailleurs.

Ce type de permis de travail est depuis longtemps décrié, car il fait en sorte qu’un travailleur étranger temporaire est lié à un seul employeur. Au cours des derniers mois, plusieurs cas d’abus ont été rapportés dans les médias.

Cependant, depuis 2019, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) peut accorder un permis de travail ouvert aux travailleurs vulnérables (maltraités, victimes de violence ou à risque de subir de la violence).

Le gouvernement Legault se dit à la recherche de moyens à mettre en place pour offrir plus de flexibilité d’emploi aux immigrants temporaires.«On va attendre les recommandations de la CPMT», s’est limité à dire M. Boulet, mardi.

Lésions professionnelles

Le ministre rapporte par ailleurs une augmentation des accidents de travail et des maladies professionnelles chez les travailleurs étrangers temporaires.

Le nombre de lésions professionnelles reconnues est passé de 1193 en 2018, à 2176 en 2020, à 3541 en 2022, parce que les travailleurs temporaires sont plus nombreux que jamais, et qu’en parallèle, la CNESST est également plus active, selon M. Boulet.

«C’est une mauvaise nouvelle, (…) mais une bonne nouvelle, parce qu’ils peuvent bénéficier d’une indemnisation et de tous les services de réadaptation qui sont fournis par la CNESST», a-t-il déclaré. 

Le 1er mars dernier, M. Boulet avait annoncé que la CNESST élargissait les activités de son Escouade prévention, afin de rejoindre les travailleurs et les employeurs dans un plus grand nombre de secteurs d’activité.

Une cohorte d’une dizaine d’agents de prévention s’était ajoutée pendant la période estivale 2023 à l’équipe permanente, déjà composée d’une douzaine de personnes.

Depuis mars, la CNESST a donné 286 ateliers, sensibilisant 2500 travailleurs étrangers temporaires qui évoluent au sein de 300 entreprises. En outre, près de 1000 employeurs ont bénéficié de conseils personnalisés.

La CNESST vérifie également systématiquement les agences de placement et de recrutement afin de débusquer celles qui n’ont pas de permis.