Quand la mort frappe… au Zoo

ANIMAUX. La girafe Kisumu, l’un des 1480 pensionnaires du Zoo de Granby, est décédée la semaine dernière. Si cette mort n’est pas la première ni la dernière à survenir à l’intérieur des murs du jardin zoologique, elle a incité le GranbyExpress à se poser cette question: que se passe-t-il lorsqu’un spécimen de l’institution trépasse?

Kisumu était, à 25 ans, en fin de vie et souffrait d’arthrose, un mal qui amenuisait significativement sa qualité de vie. Le Zoo a donc pris la difficile décision d’euthanasier la girafe, considérée comme gériatrique. «Tant qu’à la regarder souffrir et se laisser aller, on a fait un choix. C’était une question de temps, alors on l’a assistée dans ses derniers moments», explique Karl Fournier, directeur des soins animaliers. Lorsqu’une telle situation se présente, l’entièreté de l’équipe de soins vétérinaires est consultée afin d’en venir à une décision commune.

La suite est la même, qu’un pensionnaire soit décédé des suites d’une maladie, de la vieillesse ou d’une euthanasie: son corps prend le chemin de l’hôpital vétérinaire de l’organisme à but non lucratif. Les employés qui prennent soin au quotidien des bêtes sont alors avisés du décès de leur compagnon, et ce, même s’ils ne sont pas en fonction.

«Pour nous, il y a toujours une forme de deuil, ce sont des animaux auxquels on est attachés. Généralement, il y a un peu de temps qui est laissé aux membres de l’équipe pour qu’ils puissent voir la dépouille, toucher la dépouille et faire leur deuil. Dans certains cas, on va même retarder la nécropsie par respect pour les employés», explique M. Fournier.

Une nécropsie est réalisée chaque fois qu’un pensionnaire décède. Cet examen est réalisé dans cette salle spécifique de l’hôpital vétérinaire du Zoo.

Un vétérinaire de l’institution zoologique, parfois en collaboration avec un membre de la faculté de médecine vétérinaire de Saint-Hyacinthe, procède ensuite à l’examen  du corps, et ce, quelles que soient les circonstances de son décès. Une salle est d’ailleurs entièrement dédiée à cette étape, comparable à l’autopsie chez l’être humain. Celle-ci permet de confirmer la raison du décès et de vérifier si des causes sous-jacentes pourraient y avoir contribué.

«Advenant qu’on découvrirait une maladie infectieuse, c’est certain que la première chose qu’on va regarder, c’est le risque de propagation avec les autres spécimens. Une intervention serait immédiatement faite», explique le gestionnaire. Enfin, des prélèvements à des fins scientifiques peuvent être faits sur l’animal décédé.

Dans le cas de Kisumu, la nécropsie a confirmé une arthrose modérée dans plusieurs de ses membres ainsi qu’une sévère dans un autre. L’examen fait sur le corps du gorille N’Sabi, décédé en juillet 2016, avait quant à lui permis de conclure qu’un virus humain avait contribué au décès du primate. La transmission s’est fort probablement faite via de la nourriture entamée puis lancée dans l’habitat par un visiteur contagieux. Suite à cet incident, le Zoo avait d’ailleurs resserré sa réglementation et sa surveillance.

Vers l’incinérateur…

Comme c’est le cas pour les cliniques vétérinaires, des compagnies spécialisées se chargent de venir récupérer les corps. Ils seront dirigés vers l’incinération. «C’est une question de respect pour nos animaux. On veut aussi s’assurer que personne ne puisse récolter des artéfacts. On a plusieurs espèces très menacées régies par des lois. Ça prend des permis pour détenir ces espèces-là, mais aussi leurs artéfacts», explique Karl Fournier, qui mentionne que les cendres ne sont pas récupérées par la suite.

Dans certains cas, des éléments sont préalablement retirés des corps par l’équipe du Zoo, par exemple les défenses d’un éléphant ou les cornes des rhinocéros, qui ont une valeur très élevée sur le marché noir. «Ils sont gardés précieusement ici dans un coffre-fort pour éviter que ça ne se retrouve entre de mauvaises mains», explique le directeur. Certains artéfacts peuvent aussi être conservés à des fins éducationnelles ou de recherche.

En mars 2017, Vince, un rhinocéros du zoo de Thoiry, en France, a été abattu de trois balles en pleine nuit; lorsqu’il a été trouvé, ses deux cornes avaient été sciées. Les institutions zoologiques sont depuis contraintes de placer sous clé des artéfacts de valeur, une procédure qui était déjà en branle à Granby avant cet acte  de braconnage.

Karl Fournier, directeur des soins animaliers, précise que le ratio de décès des spécimens du Zoo de Granby se situe dans la moyenne.

Des enterrements…?

Les animaux ne sont généralement pas enterrés sur le terrain du Zoo. «Même si on avait amplement d’espace, on ne pourrait pas faire un cimetière comme on le voudrait. Il y a des règles à suivre. Toutefois, ça s’est déjà fait par le passé», révèle Karl Fournier.

Il y a plus de 25 ans, l’équipe d’un cirque de passage en région avait assisté au décès de l’une de ses vedettes. Le Zoo avait alors accepté de prendre en charge le corps d’un imposant pachyderme. La carcasse, enfouie sur le site, a toutefois été exhumée quelques années plus tard, une fois le processus de décomposition achevé. «Le squelette est visible dans notre bâtiment des mammifères. C’était un éléphant asiatique qui s’appelait Mary», précise M. Fournier.

Accompagner dans la vieillesse

L’institution zoologique, qui se fait un bonheur de célébrer les naissances entre ses murs, doit également composer avec la maladie et le décès naturel de ses plus vieux locataires. «On gère nos spécimens gériatriques. Ce n’est pas dans notre philosophie de nous en départir. Ça fait partie de nos responsabilités de nous assurer que nos animaux reçoivent les meilleurs soins, de la naissance à leur fin de vie», note le directeur des soins animaliers.

Son équipe, qui soigne les pensionnaires lors de blessures et de maladie, n’hésite d’ailleurs pas à adapter la médication ou l’alimentation d’un pensionnaire en fonction de sa condition afin de s’assurer de son bien-être. Notons que le Zoo de Granby est également doté d’une politique de fin de vie guidant ses actions quant aux derniers moments des animaux sous sa garde.