Le projet d’une nouvelle ressource pour hommes fait débat à l’hôtel de ville

SERVICE. Une quinzaine de citoyens se sont présentés à la dernière séance du conseil municipal pour se faire entendre concernant l’implantation d’une ressource pour hommes sur la rue Déragon. Bien qu’ils soient en faveur du service, ils ont toutefois demandé aux élus d’«arrêter de noyer le secteur», qu’ils considèrent comme déjà trop achalandé.

«La ressource pourrait être ailleurs, c’est assez le monde, a lancé la citoyenne Lucie Bergeron. Pas dans ma cour, ça ne s’applique pas, c’est déjà plein dans ma cour. On en a jusque-là. Ça suffit un peu.»

Les échanges entre les citoyens du quartier et le maire Pascal Bonin se sont faits nombreux. L’émotion était palpable, mais il n’y a eu aucun débordement.

«Je comprends à cent mille à l’heure les citoyens de dire on lève le  flag dans notre secteur parce qu’on trouve qu’on en a assez eu, a expliqué le maire de Granby. Pour installer cette nouvelle ressource, elle doit être près des services de santé. Ça fait partie des paramètres. Donc, on n’a pas 56 choix. Ce que j’en pense, c’est que ce serait dommage qu’on ne puisse pas avoir une ressource [supplémentaire] sur le territoire.»

Bon nombre de résidents de la rue Déragon se sont déplacés à la séance du conseil municipal, lundi soir, pour faire savoir leur mécontentement aux élus municipaux. (Photo: Granby Express-Vincent Lambert)

Ressource pour hommes de la Haute-Yamaska, qui s’est associé à Réseau Maisons Oxygène, veut implanter une maison d’hébergement temporaire père-enfant de cinq chambres afin d’offrir un soutien psychosocial aux pères en situation de vulnérabilité et qui sont accompagnés de leurs enfants.

Les résidents de la rue Déragon s’entendaient tous lors de la séance du conseil pour dire qu’ils sont en faveur de ce nouveau service, mais qu’ils aimeraient le voir s’installer ailleurs dans la ville puisque le secteur est déjà bien monopolisé.

«C’est résidentiel. Je pense qu’il aurait pu y avoir une maison située autrement, a commenté au micro Renaud Béliveau, résident de la rue Déragon. On est plein à la grandeur; on a de la misère à passer au coin de la rue. Le monde n’en veut pas. On veut avoir le droit de regard s’il y a un référendum.»

Parlant de référendum, c’est en effet ce qui pourrait se produire dans les prochaines semaines afin que les résidents pour ou contre ledit projet.

«J’ai comme l’impression que c’est assez évident qu’on va aller jusqu’en référendum, a souligné Pascal Bonin aux médias après la séance du conseil. C’est correct, je n’ai pas peur de ça. Les citoyens ont le droit de l’exercer. C’est le genre de dossier qui est très délicat parce que si ça avait été une ressource pour femme, on aurait arrêté. C’est triste comme société de voir que l’égalité, ça marche que sur un côté.»

«La goutte de trop»

Le maire de Granby, Pascal Bonin, ne qualifie pas la situation de la ressource pour homme du syndrome «pas dans ma cour» puisqu’il estime que c’est simplement comme «la goutte d’eau qui est de trop».

«C’est  une suite de changements successifs rapides et majeurs, a-t-il fait remarquer. Ils viennent de perdre une église et avec l’arrivée d’un CHSLD, ils voient que c’est gros. Un moment donné, la ressource pour hommes, c’est juste la goutte de trop pour les citoyens. Je ne suis pas sûr qu’ils vivent du pas dans ma cour.»

«Mon rôle est d’amener des services, a poursuivi M. Bonin. Ne me demander pas de voter contre ça, je ne peux pas. Les citoyens l’ont très bien compris. Les deux clans ne sont pas fâchés; on n’a juste pas la même opinion. Là,  je vais les guider au point de vue de la loi. Après, ça va être eux qui vont porter ça sur leurs épaules. C’est ça la réalité. Il y a une demande et on est obligés de la traiter.»

L’avis public diffusé a suscité de l’inquiétude chez les citoyens puisqu’on avait présenté le projet comme une «maison d’hébergement pour hommes» alors que c’est plutôt une «maison d’hébergement père-enfant».

«Le dossier était mal parti, a rappelé Pascal Bonin. Je peux vous garantir une chose: c’est que les doutes que les gens du quartier avaient sur la violence et sur la façon que ça se passe dans un centre de ressource, entre ce qu’on a entendu et la réalité, c’est deux univers. Les gens qui se présentent dans ces types de ressource sont dans une situation non seulement précaire, mais ils ne sont pas dans un espace où ils vont aller faire du trouble.»

Implantation du projet: Ressource pour hommes de la Haute-Yamaska réagit

Présent lors de la séance du conseil, le directeur général de Ressource pour hommes de la Haute-Yamaska, Stéphane Prévost, a indiqué trouver dommage la réaction des gens concernant le projet.

«Je n’ai pas entendu personne parler des enfants et des pères. La maison écrasait le projet; je trouve ça dommage.» M. Prévost insiste sur le fait qu’il s’agit d’une maison d’hébergement père-enfant et non d’une maison d’hébergement pour hommes. «Ce mauvais titre a mis le feu et quelqu’un a mis le feu encore plus fort avec des faussetés, ce qui fait qu’avec la perception des gens, on n’a jamais eu la chance d’expliquer le projet à la population en juillet. Dès qu’on voulait parler, on se faisait rabrouer.»

L’organisme a ciblé la maison sur la rue Déragon parce qu’elle répondait aux critères et parce que le propriétaire, aussi président de l’organisme, a accepté un délai de 12 à 18 mois avant de passer chez le notaire. «La seule personne qui a accepté le délai de 18 mois dans les maisons qu’on avait sélectionnées,  c’était notre président, a noté M. Prévost. Ça a adonné comme ça que sa maison réponde à nos critères. C’est une excellente maison qui répondait à nos critères. Je ne veux pas que les enfants aillent jouer dans le parc industriel à travers des machineries ou à travers des bouteilles vides du dépanneur d’à côté. Je veux qu’ils soient dans un milieu où ils vont pouvoir être heureux et s’épanouir. Ça, on ne l’a pas entendu [au conseil]. C’est ça qui m’a fait le plus de peine.»

M. Prévost a indiqué qu’une séance d’information se tiendra le 16 septembre pour bien informer la population et il a admis que la décision de propriété a pris beaucoup plus d’ampleur qu’il ne l’avait imaginé. «Avoir su, on ne serait pas allé de l’avant. On a tout fait pour éviter les conflits d’intérêts. On est intègre. On ne veut pas perdre notre nom pour ça. On ne pensait jamais que ça allait dérailler comme ça. Je trouve ça dommage, mais c’est encore une histoire qui va faire de l’ombre au projet.»