COVID-19: sale temps pour les nouveaux arrivants

COMMUNAUTÉ. De nouveaux arrivants en sol canadien se trouvent désemparés face à la crise de santé qui réduit leurs possibilités de réseautage et affecte profondément leur intégration sociale.

Pour révéler leur histoire, nous avons accepté de garder l’anonymat. Voici bientôt un an qu’un couple mexicain a débarqué à Granby avec leurs 4 enfants, mais n’a pas toujours trouvé leurs repères. La COVID-19 a fait irruption dans leur vie, fermant littéralement toutes les portes et érigeant d’interminables barrières. Celle de la langue est la plus importante. «Nous voulions bien nous mettre à la francisation, mais comment peut-on apprendre une nouvelle langue tout seul ou en ligne?», s’interroge la dame dans un espagnol qui ne trompe pas. Avant le début de la crise, elle s’attelait à accéder aux soins d’une garderie pour ses jumelles de 2 ans et leurs aînés de 7 et 9 ans. Tous cloîtrés à la maison depuis plusieurs mois, ils ont été contraints de se contenter de l’aide sociale. Dans la foulée, le chef de cette famille de demandeurs d’asile a perdu son emploi. Avec le relâchement progressif des restrictions, ces nouveaux arrivants comptent recourir aux services de moins en moins paralysés et à leurs compatriotes mexicains pour retrouver quelques pistes.

Aller vers des opportunités

Ce manque d’indépendance a obligé Kiza Kanamagi à interrompre sa formation dans une école d’adultes de Cowansville. «J’avais de la misère avec les cours en ligne et je ne pouvais pas continuer», affirme le jeune immigrant de 21 ans qui a fui son Congo natal, en quête de sécurité avec une dizaine de frères et sœurs. De leur premier hiver à l’avènement de la pandémie de COVID-19, ces Granbyens d’adoption vivent le rêve canadien en dehors de tout fantasme. «C’est toujours mieux de rencontrer des gens, d’aller vers des opportunités en vrai, sans être obligé de se connecter. Je ne suis pas habitué à ce système», décrit Kiza qui envisage tout de même de renouer avec la formation l’année prochaine. Il souhaiterait parachever le cycle secondaire qu’il n’a pu suivre ni au Congo ni en Ouganda. En attendant d’y arriver, le jeune réfugié nourrit l’espoir de générer de meilleures sources de revenus. «On ne peut pas juste rester à la maison pour attendre l’aide sociale», dit-il pour justifier son saut dans la vie active. Depuis fin mai, il passe ses soirées dans une usine de fabrication de papiers de toilette.

Tests négatifs

Son compatriote Ekane Mokae, arrivé en décembre dernier, a un statut de résident permanent. Il bénéficie d’une bourse d’études en plus du modeste revenu de son épouse, préposée aux bénéficiaires. «Nous avons eu un peu plus de grâces de Dieu», témoigne-t-il, décrivant le courage de sa femme qu’il a rencontrée dans un bureau de réfugiés des Nations Unies en Centrafrique. Le dernier test de COVID-19 dans cette famille de 3 enfants remonte à la première semaine de juin. Tous redoutaient la maladie en raison du contact permanent que Clémence Mokae entretient avec les aînés dans un CHSLD. «Heureusement que nous n’avons pas eu de cas», se réjouit-elle, vantant son employeur pour ses mesures «exceptionnelles». Son inscription à l’appel des 10 000 préposés pour les aînés au Québec est un espoir sans retenue pour toute sa famille.

La plupart de ces arrivants ne tarissent pas d’éloges pour la Solidarité Ethnique Régionale de la Yamaska (SERY), seul point de repère pour de nombreux étrangers. Cet organisme est mandaté par le ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIDI) du Québec pour accompagner les immigrants qui s’installent dans la région de la Haute-Yamaska et de Brome-Missisquoi. «Avant la pandémie, nous recevions déjà en moyenne une centaine d’immigrants par jour pour des besoins divers», explique Céline Gagnon du Sery. Granby fait partie des 14 villes désignées par le MIDI pour accueillir les réfugiés pris en charge par l’État. Aucune d’elle n’a prévu l’intégration d’un virus dans sa diversité culturelle.