Quand les géants dominent les petits commerçants

AFFAIRES. Ce n’est pas tous les petits commerces locaux qui peuvent voir ce qui se passera après la pandémie. Certains ont espoir d’avoir les reins assez solides pour maintenir le fort alors que d’autres sont inquiets de devoir fermer définitivement. Le maintien d’activités de magasin à grande surface représente pour plusieurs «une concurrence déloyale», selon le propriétaire du Centre vidéo-jeux.

«De ce que j’ai vu, il y en a beaucoup qui font du service pickup où tu peux aller chercher [la marchandise], a confié en entrevue téléphonique, Alain Dextraze. Tu peux rentrer dans le magasin. […] Un employé me l’a dit et je l’ai vérifié moi-même.»

Même si les portes sont barrées, les consommateurs peuvent commander en ligne ou par téléphone pour ensuite aller chercher le tout sur place, dans des commerces spécialisés en électronique par exemple, leurs produits, a relaté M. Dextraze. Et parce qu’il est encore possible de magasiner dans des magasins de grande surface où on retrouve aussi une partie «épicerie», le propriétaire du Centre vidéo-jeux estime que c’est de la «concurrence déloyale».

«Je trouve que la concurrence la plus déloyale vient de ces gros-là parce qu’ils ont le droit ou prennent le droit vu que c’est une épicerie, a-t-il relaté. Il reste qu’on est tous sur les dents présentement les commerces […] Je vais parler pour Granby, la grande majorité, c’est pas mal tout fermé. Ça va être un après COVID assez difficile.»

Alain Dextraze a pensé permettre aux gens de venir chercher certains de ses produits une seule journée dans la semaine, en respectant les mesures de distanciation sociale. La réponse n’a cependant pas été positive dans la communauté pour le point de chute.

«Ce qui me fait suer là-dedans, c’est que ce n’est jamais pareil pour les gros, a-t-il déploré. Quand c’est les gros, c’est toujours beau et il n’y a jamais personne qui ne dit rien. J’ai essayé sur ma page Facebook, je me suis fait ramasser. On est pas mal plus sévère quand c’est des petits commerces. Ça va nuire beaucoup plus aux petits commerces qu’aux gros.»

Le propriétaire du Centre vidéo-jeux a donc décidé de laisser tomber son projet de livraison ou point de chute sur le site de son commerce. Il profite de la crise pour faire du ménage.

«Normalement, j’y vais tous les jours et je travaille comme une journée normale, mais fermée, a-t-il commenté. Je fais du ménage et je refais la disposition du magasin. On s’occupe et en  même temps, on fait des choses qu’on n’a jamais eu le temps de faire.»

M. Dextraze se trouve chanceux parce que le prix de son loyer n’est pas si élevé comparativement à certains de ses comparses. Et il a une pensée pour eux.

«Combien de propriétaires de commerces qui ne rouvriront jamais? Il y a un commerce sur deux qui ne passe pas au travers de ça et je ne suis pas le seul à penser ça, car ils n’auront tout simplement plus l’argent.  C’est vraiment une catastrophe pour les commerces. On n’a jamais vu ça.»

La Chambre de commerce en soutien

Durant cette période difficile pour les entreprises, la Chambre de commerce Haute-Yamaska (CCHY) ne peut venir en aide à certaines financièrement puisqu’elle est un organisme à but non lucratif. Cependant, l’organisme offre de l’accompagnement.

«On ne peut pas conseiller un entrepreneur sur des décisions, a fait valoir la directrice générale Claude Surprenant. On partage l’information qui est donnée […] On offre des conférences, des formations par des experts selon le sujet, du réseautage pour briser l’isolement. C’est vraiment d’offrir de l’information aux entrepreneurs.»

La Chambre de commerce Haute-Yamaska encourage les entrepreneurs à innover, mais aussi à être créatifs pour passer à travers cette période difficile.

«Ce qui est intéressant par contre, c’est que les gens finissent par trouver des solutions, se réjouit Mme Surprenant. On pense à certains restaurants qui ont dû fermer, mais qui offrent certains de leur produit par la bande. Je pense que les gens sont amenés à être très créatifs dans une urgence aussi.»

Et qu’en est-il de la fermeture des commerces le dimanche? La CCHY estime que c’est une bonne décision en soi.

«Je vois ça d’un bon œil, a assuré Claude Surprenant. Je comprends le besoin d’avoir des employés en forme parce que dans les épiceries, en ce moment, ça travaille beaucoup plus qu’à l’habitude […] C’est quelque chose qu’on a déjà connu, c’est quelque chose qui se fait dans d’autres régions. Je ne vois pas pourquoi on devrait s’alarmer.»

«Si les épiceries sont fermées le dimanche, peut-être que ça va permettre à des commerces, des restaurants, de pouvoir offrir de la nourriture, de vendre davantage, a-t-elle affirmé. Quelque part, d’un autre côté, ça peut peut-être augmenter des ventes chez d’autres commerçants qui sont dans l’industrie de la nourriture.»

Récemment, deux campagnes ont été aussi lancées pour promouvoir l’achat local, soit Achat local Granby et «J’achète bleu» à l’échelle provinciale.

«Les gens doivent prendre toutes les opportunités qu’on leur offre et en profiter au maximum, a insisté Mme Surprenant. Ceux qui l’ont entendu, mais qui ne passent pas à l’acte, sérieusement […] On vous en donne sur un plateau d’argent des options, prenez-les.»