Monter au front par amour pour la prochaine génération

SOCIÉTÉ. Trois semaines après le passage de la commission Laurent sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse à Granby, Marie-Léonette Poulin n’en revient toujours pas. «L’amourologue» qui consacre ses temps libres à la cause de la jeunesse et de l’enfance depuis quarante ans continue de dénoncer le cadre rigide du forum. Aux yeux de la dame de 78 ans, l’exercice n’a rien de démocratique.

«Je m’attendais à voir une commissaire et des gens en train de poser des questions, émettre leurs commentaires et opinions. Mais après 15 minutes, j’ai bien failli m’en aller tout comme cinq autres personnes assises à ma table. On ne nous a pas laissés nous exprimer. C’était antidémocratique.»

Armée de sa lettre «témoignage» basée sur ses 40 ans d’expérience auprès des enfants, la Granbyenne, qui a fondé par le passé l’organisme Jeune de l’Avenir, je t’écoute avec son défunt mari, espérait en faire lecture, mais en vain. On lui a clairement fait savoir que le forum n’était pas dédié aux histoires personnelles. Selon «l’amourologue», la formule «table ronde» proposée par la commission n’avait pas sa raison d’être.

«Tout était dirigé. Chaque table avait sa thématique et il ne fallait pas parler trop longtemps», a laissé entendre la dame qui accompagne la famille de la fillette martyre de Granby depuis près de dix mois.

Quoi faire de la DPJ?

Déçue de la tournure de la soirée du 14 janvier dernier, Marie-Léonette Poulin n’entend pas pour autant lâcher le morceau. Le triste décès de la fillette de Granby en avril dernier doit conduire à une refonte complète de la protection de la jeunesse au Québec, souhaite-t-elle.

«C’est dommage ce qui arrive à ce système (DPJ) parce qu’à l’intérieur de la machine, j’ai connu des gens qui y mettent tout leur cœur et toute leur âme. Mais le système est défaillant.»

«Ça prend un ménage. Je n’en veux pas des recommandations de la commission. Je veux l’abolition de la DPJ. Avez-vous vu l’organigramme de la DPJ? C’est incroyable», a manifesté la dame.

Selon la septuagénaire, l’enfant devrait être placé au cœur du processus décisionnel au lieu d’en faire un dossier administratif.

«J’ai applaudi en 1979 lorsque la DPJ a été instaurée (…). Aujourd’hui, je n’applaudis plus. Je pleure.»

Des solutions? Mme Poulin avance que la gestion de la protection de la jeunesse pourrait être allégée et décentralisée. «Ça pourrait être sous la responsabilité des CLSC», soutient-elle.

La Granbyenne va même plus loin en proposant d’aborder la question de la famille sur les bancs d’école. «Je voudrais qu’on commence à parler du rôle des parents à l’école. C’est quoi être un papa? C’est quoi devenir une maman?»

 

Fillette de Granby: la famille éplorée entre bonnes mains

Avril 2019. La terre tremble à Granby. Une fillette de 7 ans mal en point rend l’âme après avoir subi d’importants sévices. Appelée à soutenir la famille éplorée à travers cette dure épreuve, Marie-Léonette Poulin affirme que la vie reprend tranquillement son cours de leur côté.

«Ils (famille) sont bien juridiquement accompagnés. Me Valérie Assouline (avocate de la mère de la fillette) fait un travail incroyable.» «Pour le moment, ils attendent le dénouement. Ils sont encore dans le chagrin et dans l’attente du petit frère.»

Rappelons que le mois dernier, le juge Mario Gervais, du Tribunal de la jeunesse, a rendu une décision dans le dossier du jeune frère de la fillette de Granby âgé de 5 ans qui a également souffert de mauvais traitements. Dans son jugement, le magistrat a décrété le maintien du garçon en foyer d’accueil pour six mois et autorisé des visites encadrées à la maman.

Et la mère de la fillette? «Je l’ai accompagnée beaucoup au début, mais depuis, j’ai pris du recul pour me protéger. Maintenant, je la sens capable de prendre des décisions. Elle n’a pas besoin qu’on lui dise quoi faire et quoi penser», confie Mme Poulin.

Dans les prochaines semaines, les procédures judiciaires des accusés (le père de l’enfant et la belle-mère) vont reprendre au palais de justice de Granby. Un processus qu’entend suivre de très près l’amourologue.

«Oui, je vais aller au palais de justice. Je veux savoir comment on va trouver la vérité. Est-ce que la vérité va vraiment sortir? Je ne le sais pas.»