Centre-ville à louer
Trois ans après la mise en place d’une stratégie de revitalisation du centre-ville de Granby, le regard des passants continue de se heurter à une foule de locaux vides. Coïncidence ou signe d’un manque d’attrait de la rue Principale?
Les départs coup sur coup de Desjardins et de la boutique Fréquences, tous deux en janvier, ont fait mal à l’image du centre-ville de Granby. À cela s’ajoute le déménagement annoncé en octobre du marché d’alimentation Avril. Entre les numéros civiques 110 et 400, pas moins de neuf locaux commerciaux de rez-de-chaussée sont actuellement vacants, selon la liste dont dispose CommercETourisme Granby_région.
Pour la directrice générale Isabelle Brochu, il s’agit d’abord d’un «concours de circonstances». Ce qui ne veut tout de même pas dire que l’organisme demeure les bras croisés. «Ça nous préoccupe et on agit. On a contacté les propriétaires de bâtiments et on vient de finir de mettre notre liste à jour», révèle-t-elle.
L’équipe de CommercETourisme travaille aussi à dénicher des commerces susceptibles de vouloir s’installer au centre-ville, ainsi qu’à conseiller les propriétaires entre autres au sujet du programme de rénovation de façades.
Malgré tout ça, Isabelle Brochu est bien consciente de la situation économique précaire du commerce de détail. «C’est difficile de démarrer dans le commerce de détail. C’est beaucoup plus difficile d’obtenir du financement. Tous les centres-villes font face à ça», admet-elle.
Pourtant, selon l’étude sur le Potentiel de développement commercial du centre-ville de Granby, réalisée par la Fondation Rues principales, ce sont les boutiques de vêtements et de chaussures qui arrivent en tête de liste des besoins. Si l’on se fie seulement à l’avis des consommateurs, ceux-ci demandent un disquaire, une librairie et un magasin de meubles.
Justement, l’ex-disquaire du centre-ville, Érick-Louis Champagne croit toujours au pouvoir d’attraction de la rue Principale. «Je pense que le centre-ville a encore sa place, autant commerciale que résidentielle. Il faut trouver le bon mélange de tout ça. J’étais dans un domaine où c’est au niveau mondial qu’il y a un grand changement. Mets-moi dans un autre domaine et je serais peut-être encore là», explique celui qui est toujours membre du conseil d’administration de la Corporation de développement commercial et touristique.
Comment donc expliquer qu’un local comme celui du 147, rue Principale, l’ex-mercerie Jules Demers, soit abandonné depuis aussi longtemps? Pour Isabelle Brochu, c’est une question de disponibilité du propriétaire et de prix de loyer. «Le prix moyen varie entre 12$ à 15$ du pied carré et là, c’est 18$ du pied carré», fait-elle remarquer.
Pourtant, bon nombre de gens accordent un potentiel immense à cet espace qui bénéficie de deux façades vitrées. Un restaurant avec terrasse? Une nouvelle mercerie? «Je vois tellement d’affaires dans ce local-là. Il y a de belles idées qui pourraient naître», commente Érick-Louis Champagne.
Celui qui est aujourd’hui directeur général de la Maison de la culture de Waterloo voit la situation comme une question de cycle. «On vit un renouveau, c’est une nouvelle génération de gens d’affaires qui doit s’installer», croit celui qui a eu pignon sur rue durant 25 ans. Il tient d’ailleurs à préciser que «bien des centres d’achats ont des locaux vides aussi».
L’agent d’immeubles Guy Nolin apporte tout de même un son de cloche différent. Mandaté pour louer l’ancien espace occupé par Med Pizza au 243, rue Principale, le représentant de la bannière Proprio Direct affirme que la demande est «beaucoup moins forte que dans le secteur des galeries». Il s’empresse tout de même d’ajouter qu’il y a «encore des gens qui veulent s’installer au centre-ville».
Guy Nolin a d’ailleurs confirmé qu’un locataire était sur le point de s’installer au 243, rue Principale. Ce qui aurait nui au dénouement du dossier, c’est le nombre de cases de stationnement disponible. «Le règlement de la Ville exige beaucoup trop de places de stationnement. Il y a seulement six cases à l’arrière. Med Pizza avait une capacité de 35 personnes, donc divisé par cinq, ça prend un minimum de sept places», déplore l’agent d’immeuble.
Centre-ville vivant
Outre l’intervention directe auprès de gens d’affaires ou de propriétaires, CommercETourisme met aussi de l’avant une stratégie indirecte. Celle-ci consiste à rendre le centre-ville vivant. On peut notamment citer la Fête des mascottes, le marché public, les midis animés par des amuseurs publics ou encore les soirées de cinéma en plein air.
«Une fois que la clientèle est là, c’est aux commerçants à faire en sorte d’aller la chercher», glisse Isabelle Brochu, dont l’équipe prépare l’annonce d’une programmation bien étoffée pour la période estivale.
Quand on ajoute à cela les efforts de Granby pour refaire une beauté au centre-ville, on ne peut pas demander mieux selon Érick-Louis Champagne. «Tu ne peux pas développer dans un lieu moribond et la Ville a mis ses culottes là-dedans».