Don d’organes et de tissus: «Il faut en parler»-Michelle Deschamps
GÉNÉROSITÉ. Sa mère, à son décès, a donné une deuxième chance à plusieurs personnes malades. Or, la décision de faire don de ses organes n’a pas été des plus simples à prendre. Aujourd’hui, la Sheffordoise Michelle Deschamps souhaite que ses concitoyens imitent le geste altruiste de sa maman, mais surtout, qu’ils fassent part de leurs intentions à leurs proches.
Jeanne-Mance Brunelle, résidente depuis peu à la résidence Courville de Waterloo, sombre dans le coma le 30 décembre 2015; elle ne reprendra pas conscience et décédera malheureusement le lendemain d’une hémorragie cérébrale massive. La dame de 77 ans avait rempli un document attestant de son choix de ne subir aucun acharnement thérapeutique. Or, elle avait aussi signé l’autocollant accolé au dos de sa carte d’assurance-maladie, confirmant vouloir faire don de ses organes lors de sa mort.
Comme une transplantation implique que le donneur soit maintenu artificiellement en vie afin que les organes demeurent viables, ses trois enfants ont été confrontés à un important dilemme afin de s’assurer du respect de ses volontés. La fratrie décide finalement d’aller de l’avant. «Notre mère, elle était comme ça, généreuse et disponible pour les autres. On a décidé de continuer», explique sa fille Michelle, qui a traversé ces moments difficiles aux côtés de son frère et de sa sœur.
Au terme de la transplantation qui s’est effectuée à l’Hôpital Fleurimont de Sherbrooke, le foie de Mme Brunelle a été séparé en deux et ses deux reins ont été offerts à des malades ; ce sont donc quatre receveurs qui peuvent aujourd’hui compter sur une meilleure qualité de vie grâce à ce généreux don.
Pour mettre à mal l’incertitude
Il aurait pourtant pu en être autrement, explique sa fille, puisque les proches doivent confirmer la volonté de la personne décédée. Dans ce cas-ci, une décision a dû être prise au nom de la septuagénaire, qui ne s’était pas fait entendre sur le sujet. Michelle Deschamps souhaite éviter que d’autres familles ne soient confrontées à un tel choix et surtout, à l’incertitude.
«Quand on signe notre carte de dons d’organes, on le dit, on l’annonce. Il faut en parler. C’est comme faire notre testament d’avance. Ça ne nous fera pas mourir plus vite et ça rend les choses beaucoup plus claires», fait-elle valoir, plus de deux ans après les événements. «Si on avait su, ajoute-t-elle, on aurait peut-être été un petit peu moins ébranlés par tout ça. On s’est demandé si c’était la bonne décision à prendre», ajoute la retraitée, qui admet avoir passé à travers une kyrielle d’émotions.
Si le mois d’avril était le mois de sensibilisation au don d’organes, il n’y a pas de moment pour aborder le sujet, fait valoir la mère de trois jeunes femmes dans la trentaine. C’est d’ailleurs pour conscientiser la population que la retraitée a accepté de rencontrer le GranbyExpress.
La bonne décision
C’est lors d’une cérémonie organisée en juin 2017 par l’Association canadienne des dons d’organes et de tissus, lors de laquelle des receveurs ont pris la parole, que Mme Deschamps a réellement pris la mesure de l’importance du geste que sa mère avait posé. «Ils nous ont parlé de la deuxième vie qu’ils ont eue à partir du moment de leur greffe. Je me suis dit que ma mère aurait été bien contente de ça», fait valoir la sexagénaire, qui ignore l’identité des gens qui ont bénéficié des organes de sa mère.
Celle qui a exercé le métier d’orthopédagogue pendant environ 35 ans invite les gens à considérer cette avenue et à ne pas fermer la porte, qu’importent leur âge et leur état de santé. «Ne vous éliminez pas d’emblée. Il y a des gens compétents qui seront capables de déterminer si vos organes peuvent être récupérés et aider d’autres personnes», explique-t-elle.
Aujourd’hui, c’est un sentiment de fierté qui habite Michelle Deschamps. Sa mère n’en est pas moins partie, mais elle a quitté ce monde par la grande porte en effectuant le plus beau geste qui soit.
Une personne faisant don de ses organes peut sauver jusqu’à huit vies; c’est sans compter les très nombreuses personnes malades qui pourront, grâce à ce choix, recouvrer la santé.