Fuir la guerre: un réfugié congolais se souvient

SOCIÉTÉ. Cyprian Rukara est arrivé à Granby en 2010 avec sa femme et son fils, respectivement Lydia et Thiery. Le Congolais se souvient de son arrivée au Québec, terre d’accueil pour ses réfugiés du génocide rwandais.

Il est bientôt midi. C’est jour de congé pour Cyprian Rukara, ce Congolais qui travaille comme préposé au CHSLD de Granby. Sa femme Lydia étudie dans la cuisine. Thiery, son fils de 16 ans, est à l’école.  

Des photographies sont accrochées dans le salon. Quelques accessoires africains trainent ici et là.

Le téléjournal joue en trame de fond lorsque Cyprian Rukara entame son récit. Il raconte pourquoi il a fui son pays d’origine. «C’est à cause de la guerre. C’est à cause du génocide rwandais», explique-t-il.

Ce conflit a mené à l’exode de milliers de réfugiés rwandais au Congo en 1994. Plusieurs génocidaires se trouvaient dans le lot et prirent le contrôle des camps de réfugiés. Ils planifiaient de reconquérir le Rwanda. S’ensuit la Guerre mondiale africaine.

La famille Rukara s’est installée au camp de réfugiés de Nakivale en 1996 et y est restée jusqu’en 2010. Thiery y est d’ailleurs né.

En 2008, après avoir passé des entrevues puis complété des examens médicaux, Cyprian Rukara obtenait son billet d’or pour le Canada. «Le Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés envoie la demande à tous les pays. Ensuite, ils (les pays) vérifient si notre orientation leur convient», précise-t-il.

En mars 2010, la famille embarquait pour la première fois dans un avion, et ce, en direction de Montréal.  «Dans l’avion, j’ai vu la neige pour la première fois. Je me demandais ce que cette farine blanche faisait sur les toits des maisons», lance en rigolant Cyprian Rukara.

Des bénévoles de la Croix-Rouge les attendaient à Montréal. M. Rukara connaissait bien cet organisme puisqu’il avait travaillé pour la Croix-Rouge dans son pays. Il y avait rencontré une Québécoise. Cette dernière lui avait parlé longuement de son pays. «Je connaissais donc un peu les mœurs du Canada», indique-t-il.  

Un taxi avait ensuite transporté la famille jusqu’à un hôtel de Granby. Des employés de Solidarité Ethnique Régionale Yamaska (SERY) étaient sur place. «Notre accueil s’est bien passé grâce au SERY. Ils nous ont accompagnés pour toutes sortes de choses comme l’épicerie, remplir des formulaires, ouvrir un compte de banque», mentionne le Congolais.

Ils sont restés une dizaine de jours à l’hôtel, soit le temps qu’on leur trouve un logement. 

Les défis

Cyprian Rukara insiste pour dire que le SERY a été d’une grande aide dans son processus d’accueil et d’intégration.

Cela dit, arriver dans un nouveau pays implique une dose de défis, reconnait-il. Heureusement pour lui, la langue n’a pas été une barrière. «Pour d’autres immigrants, c’est plus difficile. Lorsqu’ils arrivent, ils ne peuvent même pas aller à l’hôpital par eux-mêmes parce qu’ils ne parlent pas français».

M. Rukara est bénévole pour le SERY. Il accueille et intègre régulièrement des familles africaines.

Comme conseil aux nouveaux arrivants, Cyprian Rukara leur suggère de s’adapter à leur nouveau pays. «Quand on arrive dans une autre culture, il faut oublier des parties de notre culture et il faut s’adapter aux gens du milieu».

C’est ce qu’il a fait, dit-il. C’est plutôt au travail qu’il a rencontré son plus grand défi.

Selon lui, ils sont nombreux les employeurs à vouloir engager des immigrants, mais ce n’est pas tous les employés qui sont prêts à travailler avec ces derniers. Cyprian Rukara en a été témoin. Il rapporte que des amis immigrants ont préféré passer d’un emploi à 15 $ l’heure à un emploi au salaire minimum afin de fuir ce problème.

«Ce n’est pas des réfugiés qui ne veulent pas travailler, c’est des réfugiés qui rencontrent des problèmes au travail», mentionne le bénévole du SERY.

Il croit que le gouvernement devrait sensibiliser davantage la population à ce sujet.  

Chose certaine, le Congolais ne compte pas baisser les bras. À l’heure actuelle, il étudie les mathématiques et envisage de devenir comptable.