Édith Butler: l’Acadie et les étoiles

CULTURE. Édith Butler est au Québec (et au Nouveau-Brunswick), ce que Barbara est à la France. Alors, que peut motiver la grande dame de la musique folklorique à remonter sur scène? Le public, bien sûr, mais si ce n’était que pour l’amour de ses fans, un show ici et là suffirait. Mme Butler s’est confiée sans filtre au Granby Express, confirmant de ce fait, une primeur bien espérée de son public.

« Je fais de la généalogie tous les soirs! Je traîne, avec moi, tout mon monde. Et là… je marche dans le bois, chez moi, et je pense à tout ce monde qui est passé avant nous, car nous sommes faits de ce bagage. Comme ce soir, quand je racontais une de mes histoires, c’était pâpâ qui m’a fait sortir ça! » 

 

Cette réponse fait suite à une question personnelle que l’artiste a bien voulu partager avec vous, les lecteurs du Granby Express. La question suivait cette prémisse: on dit que chacun de nous traîne, en partie, l’enfant que nous fûmes, et ce, même adulte et à l’âge de raison. Nous cherchons constamment à grandir par rapport à ce point d’ancrage de notre vie. Comme s’il s’agissait d’une échelle de bonheur nous permettant de calibrer les aléas de la vie, mais aussi, comme un repère qui, à tort ou à raison, nous dirige vers les acteurs qui vont constituer, selon qu’ils nous ramènent à cette période rassurante de notre existence, notre vie. Ce court laps de temps que nous passons dans notre vie, ici-bas, où notre seul souci était d’être heureux. 

 

Son père, sa mère, qu’elle a perdue pendant la pandémie, son oncle Joe sont tous des acteurs qui ont constitué son enfance en Acadie. Or, c’est une occurrence que l’on retrouve dans son œuvre et qui est en parfaite cohérence avec le personnage coloré qu’on retrouve sur scène. Car détrompez-vous, certes elle chante, bien entendu, mais de façon intermittente, elle partage avec nous tous ces anecdotes sans censure, et ce, tout au long de son show. « Ça me permet de reprendre mon souffle! » Argue-t-elle d’un ton humoristiquement franc.

 

« Tout le monde le sait maintenant, j’habite en Estrie, mais vraiment en Estrie! Je suis dans le fond des bois! Et le soir, parfois, je regarde le ciel, sans la pollution visuelle de la ville et je vois ces milliards d’étoiles! C’est incroyable toute cette beauté! » 

 

Son bagage familial et la beauté de la nature sont inéluctablement une source d’inspiration pour l’artiste et de façon manifeste, évocateur de ce réconfort que chaque humain cherche à combler la vie durant. Ses ancêtres, proches et moins proches, peuvent se reposer sans aucun souci, car ils ont une représentante fidèle au cou robuste pour supporter la couronne. 

Le retour

Avec une carrière riche comme celle de Mme Butler, on pourrait s’attendre à la voir de temps à autre pour un spectacle ponctuel. Cependant, l’artiste a bien voulu partager, avec le Granby Express et ses lecteurs, une primeur. Le fait de repartir en tournée dépendait uniquement de la réponse de son public ce soir. Alors, si elle attendait une réponse, elle l’a eue:

 

« La réaction était tellement énorme. D’abord, j’ai pensé que la COVID allait empêcher les gens de sortir et quand j’ai vu la tempête à matin, je me suis dit « ah non! C’est pas vrai! », mais je disais à Lise (son amie et directrice de tournée des 49 dernières années), quand ben même qu’il y aurait la moitié de la salle, je vais pouvoir essayer l’album et l’orchestre. C’est une nouvelle équipe là tous ces jeunes. Alors, si ça colle, si l’enchaînement des chansons se fait bien, si la magie est là… en plus j’suis arrivée et j’ai vu tout ce monde-là, aïe aïe aïe…eh ben! On est parti pour une tournée! [sic] », dit-elle en riant.

 

Si le spectacle de ce soir était, en quelque sorte un « test », la chanteuse reste, malgré sa notoriété, surprise de la réaction de son public et c’est, assurément, ce qui fait son humilité. Ce côté d’elle qui refuse de s’asseoir sur des acquis, lesquels on le sait, sont éphémères dans le milieu du show-business:

 

« Le public était tellement chaleureux et je n’avais pas besoin de faire grand-chose là, c’était comme « houuuuu » en pleine face là tu comprends (rire)! Cependant, pour moi, la réaction du public c’est toujours le plus beau spectacle. » 

Plusieurs étoiles de plus dans son ciel…

Si Édith Butler est satisfaite de l’accueil chaleureux de son public, il reste qu’elle a subi plusieurs pertes ces dernières années. Sa collègue et amie de longue date avec qui elle a fait beaucoup de tournées, Renée Martel, est décédée en 2021. Aussi, sa maman est partie à son tour pour le grand voyage durant la pandémie et elle n’a pas pu assister aux obsèques, ce qui affecte énormément la « Mère de la musique acadienne ». Elle avait donc ce besoin auquel tous les êtres humains sont confrontés un jour, le besoin d’être aimé. Très humblement, Mme Butler admet qu’elle avait besoin de recevoir cet amour qui vient du public, mais aussi, peut-on comprendre, des autres. C’est donc deux étoiles, pour ne nommer que celles-là, qui viennent s’ajouter dans le ciel d’Édith Butler.

Le show

Malgré les raisons les plus intrinsèques mentionnées plus haut, il reste un facteur qui est à l’origine de ce retour sur scène… Lisa Leblanc. La consœur acadienne d’Édith Butler lui a proposé de réaliser l’album Le tour du Grand Bois. « Avec un album pareil, pas l’choix de faire une tournée! », affirme Mme Butler avec un rire rayonnant. La chanteuse qui soufflera ses 80 bougies en juillet prochain n’a certainement pas fini d’impressionner. Une fougue que bien des jeunes n’ont pas, mais surtout, le détail qui transperce… le lien visuel qu’elle cherche avec son auditoire. Contrairement à beaucoup de ses collègues, Édith Butler ne regarde pas le vide de la salle lorsqu’elle parle entre deux chansons. Elle regarde les gens, elle crée un lien avec son public. 

 

Confirmation faite, il est déjà possible d’avancer qu’elle sera présente le 5 août à Caraquet, Nouveau-Brunswick, et, bien sûr, vous pourrez trouver les dates de ses concerts éventuellement. D’ici là… espérez avoir une place à Caraquet!