L’improbable parcours de Kim Thúy

LITTÉRATURE. La popularité de la chouchou des Granbyens ne se dément pas : quelques 500 personnes se sont déplacées au Palace mardi soir pour entendre Kim Thúy raconter les innombrables péripéties qui composent sa propre histoire.

Par Roxanne Langlois

La salle était quasi bondée ; l’heure était aux éclats de rire et aux confidences. Avec la désarmante simplicité qu’on lui connaît, l’auteure qui a grandi à Granby a généreusement offert plus de deux heures d’anecdotes.

De son départ du Vietnam sur un bateau de pêche où une boat people était embarquée par accident, en passant par sa discussion d’ascenseur avec l’astronaute Julie Payette et l’échec de son restaurant où le menu quotidien ne contenait qu’un seul choix de repas, l’écrivaine semblait avoir envie de tout raconter et partager.

D’ailleurs, la grande amoureuse des mots  parvenait à peine à suivre une direction précise, tant les péripéties abondaient. Les spectateurs ont ainsi eu droit à une sympathique pluie de «Rappelez-moi d’y revenir» et de «Pourquoi je vous racontais ça, déjà?», qui ont déclenché le rire à tous coups.

Des réalisations accidentelles

Ce qui ressort de son étonnant parcours, c’est que tout semble lui être littéralement tombé dessus malgré elle. Avocate sans le vouloir puis restauratrice par défaut,  elle a griffonné les premières notes ayant menées à son succès mondial <I>Ru<I> au volant de sa voiture… pour éviter de s’endormir aux feux rouges.

C’est finalement le producteur télé André Dupuy (Feux, Apparences, Vertige et Aveux), un client du restaurant qu’elle croyait bibliothécaire, qui l’a convaincue de la valeur de ses écrits. Son premier roman a été publié sans tarder, sans même qu’elle ne fasse elle-même les démarches pour y arriver. «Tous mes rêves se sont réalisés avant même que je n’aie le temps d’y penser», a-t-elle confié à la foule.

Et si le succès semble la suivre à la trace, c’est peut-être parce qu’elle est abonnée à l’optimisme: «J’aimerais ça, désespérer de temps en temps, mais quelque chose fait en sorte que je ne peux pas. Je n’en ai pas le droit».

Indifférents à la mort

La Québécoise, qui a fui le régime communiste vietnamien avec sa famille à la fin des années 1970, n’a pu éviter d’aborder une question fortement médiatisée actuellement : l’arrivée massive de migrants aux frontières, s’échappant tout comme elle l’a elle-même fait.

Elle a entre autres raconté avoir fortement réagi en entendant un journaliste affirmer que si les réfugiés savaient tout du voyage pénible les attendant et des risques qu’il comporte, ils seraient moins enclins à tenter le tout pour le tout.

«L’information ne sert à rien. Ceux qui quittent sont déjà morts dans leur tête. Ça ne leur dérange pas de mourir pour vrai en essayant de partir, parce que rester n’est surtout pas une option», a-t-elle défendu. Kim Thúy a d’ailleurs participé à un documentaire consacré aux boat people vietnamiens lancé l’année dernière, Une nuit sans lune, signé Thi Be Nguyen et Marie-Hélène Panisset.

L’auteure a à son actif quatre œuvres qui connaissent un immense succès : Ru,À toi, Mãn et Vi. En plus d’avoir remporté bon nombre de prix littéraires, ses mots sont distribués dans 25 pays.