Le commerce en mutation à Granby

AFFAIRES. AFFAIRES. Un an après la fin des travaux sur la rue Principale, la municipalité tente encore de maximiser son achalandage, notamment pour le bien-être de ses commerçants. Par ailleurs, les multiples défis auxquels ces derniers font face actuellement, notamment le remboursement des prêts octroyés durant la pandémie, la popularité de l’achat en ligne diminuant les achats locaux, les ruptures de chaînes d’approvisionnement, et un contexte marqué par l’inflation n’aident en rien leur situation.

À la fin de l’année 2023, le taux d’inoccupation des locaux dans le -centre-ville de -Granby atteignait 12,7 %. En excluant les services en redéfinition, les commerces de détail et les restaurants affichaient un taux de vacance de 10 %. «Ce chiffre est relativement sain, car il inclut toujours un 2 à 3 % lié à l’obsolescence ou à la dévitalisation des locaux que nous ne pourrons jamais totalement occuper », explique Ysabelle Duchesne, conseillère en développement commercial chez Commerce Tourisme Granby région (CTGR).

Pour Félix Dionne, conseiller municipal et président de CTGR, il fallait impérativement revitaliser le centre-ville afin d’insuffler un nouveau visage à ce lieu emblématique de Granby. «Une ville qui ne revitalise pas son -centre-ville va mourir avec, c’est comme ça. Ensuite, est-ce que c’est reparti sur les chapeaux de roue? Peut-être pas, mais on a fait des animations et on a assuré une certaine présence de la clientèle», affirme le conseiller responsable du développement commercial et touristique à Granby.

En effet, selon M. Dionne, la stratégie actuelle va -au-delà de simplement remplir les locaux vacants. Elle vise à augmenter la fréquentation du centre-ville par diverses animations et événements, et surtout, par le développement résidentiel. «On veut qu’il y ait des logements qui soient construits au centre-ville, il y a des projets connus avec des appartements pour toutes les bourses, et ça va amener une belle mixité du point de vue de la clientèle», fait-il savoir.

«Plus il va y avoir des gens qui vont habiter dans le centre-ville, plus il y aura d’animation qui se fera et plus il va y avoir des commerces de proximité qui vont venir s’installer pour combler les besoins de la population. On est convaincu que c’est cette mixité d’actions qui va revitaliser le centre-ville. Et avec tous les événements qui s’en viennent, on est déjà dans cette optique», ajoute Fanny-Isa Breton, codirectrice générale et responsable du développement commercial chez CTGR.

Entre préoccupations et enjeux

En ce qui concerne les fuites commerciales, la conseillère en développement commercial alerte sur la transformation des métiers traditionnels, tels que les boulangers et les cordonniers, qui se raréfient, laissant des vides dans l’offre de services de proximité. «Ce qui va être le nerf de la guerre, c’est d’éviter d’élever des structures commerciales où on a déjà un grand vide, comme les fameux locaux professionnels. Nous avons déjà une offre de locaux professionnels assez impressionnante, alors c’est sûr que développer des projets commerciaux en mettant de l’avant cet aspect, c’est un peu aller à contrecourant», mentionne Ysabelle Duchesne.

Pour ce qui est des préoccupations majeures pour les commerçants, selon les membres de CTGR, celles-ci concernent davantage les marges de profitabilité, affectées notamment par l’augmentation du coût des matières premières. «En restauration par exemple, il y a des morceaux de protéines qui varient de 15 $ la livre. Le menu ne tient plus la route, parce qu’on ne peut pas augmenter le prix d’une table hôte de 15 $. Les marges de profitabilité sont critiques et affectent directement le cashflow (flux de trésorerie)», soutient Mme Duchesne.

«Une entreprise peut être en excellente santé, mais ne plus avoir de cashflow à cause des marges de profitabilité, c’est cet équilibre-là en 2024 qui risque de me faire peur», ajoute-elle.

Concernant l’arrivée possible de grandes chaînes comme Costco à Granby ou aux alentours, l’impact est considéré comme modéré. Les expériences d’autres villes montrent que bien que ces grandes enseignes puissent initialement détourner certains clients, le marché local tend à s’équilibrer avec le temps. «Ce qu’ils ont constaté à Drummondville, c’est que l’arrivée du Costco a incité plusieurs commerçants à rénover leurs locaux, pour rehausser la qualité et garder leur clientèle. Comme dans tout projet, il y a des pour et des contre, mais le marché va se balancer à ce moment-là», raconte Mme Breton.

Cela dit, le même optimisme n’est pas partagé concernant le commerce en ligne. «La clientèle du Costco y va déjà. Ça veut dire qu’elle fuit Granby pour aller dépenser et s’approvisionner ailleurs. Pour le commerce en ligne, nous avons littéralement un client qui disparaît et qui ne prend plus rien chez nous. Le commerce en ligne embête davantage, parce qu’il prend des parts de marché, il y a donc une sensibilisation à faire pour maintenir l’achat local», conclut Mme Duchesne.