Bruit excessif à Brossard: une compensation devra être versée à des résidents

MONTRÉAL — La Ville de Brossard, en banlieue de Montréal, a été condamnée à payer des milliers de dollars à environ 300 résidents qui disent avoir subi pendant des années du bruit de circulation déraisonnable.

Les résidents, qui ont intenté le recours collectif il y a dix ans, habitent le long d’un tronçon du chemin Des Prairies où la circulation a augmenté de façon constante au fil des années, à mesure que la communauté grandissait.

Le quartier était autrefois en grande partie agricole, mais maintenant, le chemin Des Prairies est relié à un grand boulevard et à un grand centre commercial, et 10 000 véhicules y circulent chaque jour, a écrit la juge Dominique Poulin de la Cour supérieure du Québec dans sa décision rendue le 10 octobre.

« Le tribunal a entendu 11 riverains crédibles, sincères, convaincants et découragés, fortement impactés par la circulation qu’ils jugent excessive, ce qui leur cause des inconvénients qui dépassent, aux yeux du tribunal, par leur gravité et leur récurrence, les inconvénients normaux qu’ils doivent subir du fait de vivre le long du tronçon», a commenté la juge Poulin dans son jugement. Les résidents n’avaient «aucun répit» face au bruit et nombre d’entre eux ont dû insonoriser leur maison à cause de la circulation, a-t-elle ajouté.

«Ils ne peuvent pas ouvrir leurs fenêtres», a écrit la juge. « Ils sont gênés par le bruit à l’extérieur de leur maison et ne peuvent pas avoir de conversations normales lorsqu’ils sont devant leur maison. Même si certains profitent encore de leur cour et de leur jardin, ils se plaignent que le bruit perturbe leur quiétude.

La Ville de Brossard a soutenu qu’elle avait aménagé le quartier conformément à la loi et que malgré le fait qu’elle n’avait aucune responsabilité de réduire la circulation sur la route, elle avait pris des mesures pour réduire le volume, le bruit et la vitesse des véhicules.

Brossard a également fait valoir qu’elle bénéficiait de l’immunité contre la poursuite, car les décisions étaient politiques, a écrit Dominique Poulin. Même si les décisions politiques fondamentales prises par des dirigeants élus qui nécessitent des jugements de valeur sont couvertes par l’immunité si elles sont prises de bonne foi et non irrationnelles, a-t-elle déclaré, l’immunité ne s’applique pas à la mise en œuvre et à l’exécution de ces politiques. De plus, le juge a estimé que la quantité de trafic dans la rue n’était pas le résultat d’une décision politique délibérée.

Des résidents ont témoigné qu’ils avaient choisi de déménager sur le chemin Des Prairies parce qu’il était situé dans un quartier tranquille et à caractère historique, mais tout cela a changé avec la croissance de la ville.

Lors d’une consultation sur le développement du district en 1999, Brossard a déclaré qu’elle prévoyait protéger le caractère historique du tronçon et qu’elle prendrait des mesures pour limiter la circulation sur celle-ci, mais en 2013, elle a reconnu que cela n’avait jamais été fait.

Une autre consultation publique a eu lieu en 2013, mais les résidents ont déclaré que les plans de la ville ne répondaient pas à leurs attentes et ont entamé le processus de recours collectif.

La juge Poulin a constaté que la Ville était responsable du bruit excessif. Les résidents qui habitent le quartier depuis le 31 décembre 2009, lorsque le juge a constaté que la situation s’était aggravée, sont admissibles à 2000 $ pour chaque année où ils vivaient dans la rue depuis le 12 février 2013. Le recours collectif inclut tous ceux habitaient le long de la rue à cette date.

Ceux qui ont déménagé dans la région après le 31 décembre 2009 et qui auraient dû savoir que les résidents étaient préoccupés par le problème de circulation recevront 500 $ pour chaque année où ils y ont vécu depuis le 12 février 2013.

« Même si les membres de ce groupe ne pouvaient pas s’attendre à ce que ce tronçon reste une route de campagne peu fréquentée, ils auraient pu raisonnablement espérer que le progrès et le développement urbain ne leur causeraient pas de tels inconvénients », a estimé la juge, ajoutant qu’ils ne pouvaient pas s’attendre à ce que leur qualité de vie se détériore à ce point.

La juge Poulin ne considère cependant pas que la Ville ait commis une faute _ et refuse donc la demande de dommages exemplaires des citoyens. Elle a également refusé d’ordonner à la Ville de diviser le quartier en deux impasses, comme les habitants l’avaient demandé.

La porte-parole de la Ville de Brossard, Colette Ouellet, a déclaré que la Ville faisait appel de la décision, mais a refusé de commenter davantage.