Il y a 90 ans avait lieu à Toronto l’émeute antisémite de Christie Pits

TORONTO — Il y a 90 ans cette semaine, l’«émeute de Christie Pits» devenait l’un des pires épisodes de violence à motivation ethnique ou religieuse de l’histoire de Toronto.

L’émeute du 16 août 1933 a commencé lorsque de jeunes hommes ont déployé dans le parc Christie Pits une banderole avec une croix gammée, à l’issue d’un match de balle-molle avec une équipe composée principalement d’adolescents juifs.

Adolf Hitler était devenu chancelier de l’Allemagne en janvier de cette année-là. Le soutien à son parti nazi et l’antisémitisme se répandaient aussi à Toronto, a déclaré Cyril Levitt, coauteur du livre «The Riot at Christie Pits», paru en 1987. Le livre, écrit avec William Shaffir, relate la propagation à Toronto de «clubs à croix gammée», qui prétendaient protéger les communautés des «éléments indésirables».

Une bagarre de plusieurs heures a éclaté après le match de balle-molle du 16 août. Des jeunes d’origine italienne et ukrainienne ont soutenu les Juifs contre les «sympathisants nazis», selon de multiples récits historiques. Personne n’a été tué dans la mêlée générale qui a impliqué des milliers de personnes.

M. Levitt estime qu’il est crucial que la population reste informée de cet épisode de violence et de l’antisémitisme qui régnait à Toronto à l’époque. «Ce n’était pas illégal de refuser de louer des propriétés à des Juifs», a-t-il déclaré en entrevue. 

Sam Rosenthal, dont le grand-père possédait une pharmacie près du parc Christie Pits en 1933, a créé une pièce de théâtre pour sensibiliser les groupes scolaires aux émeutes et à l’antisémitisme à cette époque.

«La haine envers les Juifs et les autres immigrants était si forte que si ces jeunes hommes n’avaient pas résisté ce jour-là, qui sait combien de temps cela aurait duré», a déclaré M. Rosenthal.

La pièce, cocréée avec Drew Carnwath pour leur compagnie de théâtre «Hogtown Collective», a été financée par le Conseil scolaire de Toronto. Elle témoigne des difficultés économiques et de l’intolérance qui sévissaient à Toronto pendant la Grande Dépression.

M. Rosenthal a pu constater pendant la tournée que les Torontois ignoraient l’existence de cet épisode violent. Le spectacle devrait d’ailleurs être joué à nouveau au parc Christie Pits l’année prochaine.

«On ne parle pas de la Seconde Guerre mondiale de l’autre côté de l’Atlantique: ça s’est passé ici même, à Toronto!», dit-il.