La politique de la Saskatchewan sur l’usage des pronoms à l’école violerait la loi

REGINA — La politique provinciale de la Saskatchewan sur l’utilisation des pronoms dans les écoles prive les élèves de leur droit à l’identité de genre, tranche la protectrice des enfants de la province, Lisa Broda.

«Cette politique est clairement discriminatoire à l’égard des enfants transgenres qui ne veulent pas, ou ne peuvent pas, demander le consentement de leurs parents pour choisir le pronom qu’ils préfèrent utiliser à l’école», a écrit Mme Broda dans un rapport de 41 pages publié vendredi.

«Les enfants sont des êtres humains dotés de droits propres et d’une capacité légalement reconnue de prendre certaines décisions personnelles en fonction de leur maturité et de leurs capacités», a-t-elle poursuivi.

Mme Broda a soutenu que cette politique est également contraire à la loi ou discriminatoire. Toutes les personnes, quel que soit leur âge, ont droit au respect de leur identité de genre, a-t-elle fait valoir.

«Le ministère de l’Éducation et toutes les écoles de la province sont soumis à ces obligations légales», peut-on lire dans son rapport.

Le gouvernement de la Saskatchewan a annoncé en août qu’il exigerait qu’un élève de moins de 16 ans obtienne le consentement de ses parents avant que le pronom qu’il utilise à l’école puisse être changé.

Dustin Duncan, qui était alors le ministre de l’Éducation de la province, avait expliqué que la province souhaitait normaliser les politiques en matière d’utilisation des pronoms dans toutes les écoles. Il a également mis de l’avant que certains parents et enseignants s’étaient plaints.

Une contestation judiciaire a été lancée contre cette politique, tandis que le gouvernement a déjà fait savoir son intention de l’inscrire dans la loi cet automne.

Le premier ministre de la province, Scott Moe, a déclaré cette semaine qu’il était prêt à recourir à la clause dérogatoire pour protéger cette politique.

La province a rappelé que les écoles doivent fournir du soutien aux enfants qui ne se sentent pas acceptés à la maison en raison de leur identité de genre, sans toutefois préciser les exigences qui leur sont imposées.

«Le fait que la province s’appuie sur les « droits parentaux » pour justifier sa politique ne l’emporte pas sur les droits de l’enfant», a déterminé Mme Broda.

«Les mêmes enfants qui se voient refuser leur identité de genre à la maison vont se la voir refusée à l’école, a dénoncé Mme Broda. Les élèves transgenres les plus vulnérables sont donc encore plus marginalisés par cette politique.»

À la connaissance de Mme Broda, le gouvernement du Parti saskatchewanais n’aurait pas consulté les commissions scolaires, les syndicats d’enseignants, le personnel scolaire, les experts ou la Commission des droits de la personne de la Saskatchewan avant de mettre en place cette politique.

«Considérant que la reconnaissance de l’identité de genre est une question de droits de la personne qui a un impact significatif sur les jeunes, il est à noter que les enfants et les adolescents — y compris ceux qui sont transgenres ou de genre divers — n’ont pas été consultés, bien qu’ils soient directement concernés», a souligné Mme Broda.

Le gouvernement ne recule pas

Les groupes de défense des droits de la personne qui s’opposent à la politique de la Saskatchewan craignent que des enfants transgenres soient forcés de révéler leur identité de genre à des parents dont la réaction pourrait être très négative.

Une décision similaire prise plus tôt cette année au Nouveau-Brunswick s’est heurtée à une intense opposition de la part des groupes de défense des personnes LGBTQ+.

Selon la protectrice des enfants et de la jeunesse du Nouveau-Brunswick, Kelly Lamrock, la politique de cette province viole la Loi sur les droits de la personne de la province, la Loi sur l’éducation, ainsi que les droits des enfants garantis par la Charte des droits et libertés.

Le gouvernement de la Saskatchewan n’a pas répondu aux préoccupations de la protectrice des enfants dans une brève réponse au rapport.

«Le ministère de l’Éducation prend acte des commentaires dans le rapport et convient qu’il existe divers impacts positifs découlant de la politique, comme la reconnaissance de l’importance des parents et des tuteurs dans le soutien au développement d’un enfant», a-t-il écrit dans un communiqué.

« Le gouvernement de la Saskatchewan reste déterminé à protéger le droit des parents de participer à l’éducation de leurs enfants et à mettre en œuvre la politique d’inclusion et de consentement parental», a également réitéré le gouvernement.

Le porte-parole de l’opposition néo-démocrate de la Saskatchewan, Matt Love, a affirmé dans un communiqué que le gouvernement du Parti saskatchewanais devait abandonner cette politique.

«La protectrice des enfants s’est prononcée: la politique viole les droits des enfants», a-t-il dénoncé.