Le mur de la mémoire de l’Ukraine met l’accent sur un pays en guerre

KYÏV, Ukraine — Yuri Pisarenko tend les bras vers le haut du mur de la mémoire érigé en hommage aux soldats disparus, en tire un portrait fané de son petit-fils et dispose respectueusement une photo identique à sa place.

Timofy Pisarenko, 19 ans, a été tué par une mine terrestre un jour après Pâques.

Le mur, créé en 2014, a été mis à jour au cours de la dernière décennie pour honorer les victimes des guerres de la Russie contre l’Ukraine. Alors que les panneaux originaux étaient soigneusement structurés avec des images militaires ordonnées, cela a changé après le début de l’invasion russe en février de l’année dernière.

Les membres de familles en deuil ont placé des centaines de photos personnelles.

«C’est très important à cause de ce que ça représente», affirme Yuri Pisarenko à La Presse Canadienne par l’intermédiaire d’un interprète. Il montre des photos de son petit-fils et d’un mémorial qu’il a chez lui.

«C’est important parce que tant de personnes sont mortes pour la liberté de l’Ukraine. Il y a de la colère.»

M. Pisarenko dit que les blessures restent vives, surtout à l’approche de la fête des Pères.

«Le problème, c’est que sa sœur cadette ne sait toujours pas qu’il est mort. Elle a huit ans. Elle l’aime beaucoup», souligne-t-il.

Le mur de la mémoire est devenu un point central de la guerre avec la Russie. Le président américain Joe Biden a récemment visité le mur, tout comme le premier ministre Justin Trudeau, qui a déposé une couronne sur le site.

«Ce ne sont pas des photos militaires officielles qui sont prises lorsque vous vous enrôlez dans l’armée. Ce sont des photos mises ici par des êtres chers, les dernières photos qu’ils avaient, les meilleures photos qu’ils avaient», affirme Larisa Galadza, ambassadrice du Canada en Ukraine.

«Quand les dirigeants du monde viennent à Kyiv, ils viennent ici… et passent quelques instants dans ce même espace de vies perdues, de tragédie et d’horreur.»

Viktoria Lessrnov examine une photo de son mari, Vitali, tué en septembre dernier par un mortier russe.

«J’ai vu que sa photo a pâli, alors la prochaine fois, j’apporterai une nouvelle photo», dit-elle par l’intermédiaire d’un interprète en essuyant une larme.

«Il a toujours été le héros pour moi. Je me sens un peu mieux maintenant.»

Elle dit que cette année, la fête des Pères va être très difficile pour leurs deux filles, âgées de 10 et 6 ans.

«Elles nient toujours le fait de sa mort. Elles ne croient pas qu’il est mort. J’aurais simplement souhaité qu’ils aient plus de temps ensemble… nos filles et leur père», dit Mme Lessrnov.

«Je veux que le monde sache ce qui se passe en Ukraine à l’intérieur du pays. À quel prix sont la victoire et l’indépendance de l’Ukraine?»

Des enfants jouent à proximité de chars et de véhicules militaires russes incendiés. L’un d’eux s’aventure près du mur de la mémoire et regarde la couronne canadienne.

«Les enfants de cette génération ont perdu leur enfance», dit le père de l’enfant en ukrainien.