Les filles subissent davantage d’impacts de l’anxiété de performance que les garçons

MONTRÉAL — L’anxiété de performance a davantage d’impacts sur les filles que sur les garçons, particulièrement sur leur motivation et leurs résultats en mathématiques, conclut une étude menée par des chercheuses de différentes universités québécoises. 

Parue dans la revue «Contemporary Educational Psychology», l’étude a sondé 478 élèves de la région de Joliette, dans Lanaudière, et de Saint-Hyacinthe, en Montérégie, et s’est intéressée à leur anxiété lors de leur passage de la sixième année à la première secondaire. 

Les élèves ont été interrogés à trois moments : au printemps 2018, à la fin de leur sixième année du primaire, au début de leur première année au secondaire, et à la fin de celle-ci. L’étude a obtenu un taux de 82% de participation lors des trois étapes. 

«Les filles manifestent plus d’anxiété de performance que les garçons, ça, c’est quelque chose qui n’était pas surprenant. On sait que les filles ont tendance à avoir plus d’anxiété, plus de troubles anxieux», souligne Isabelle Plante, professeure au département de didactique de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), qui a participé à l’étude. 

«Ce qui était un peu plus surprenant, c’est qu’à taux égal, ce qu’on observe, c’est que les filles semblent en souffrir davantage, ajoute-t-elle. Ça influence, ou c’est lié à leur motivation et à leur réussite ultérieure.»

Le fait que l’anxiété de performance des filles soit exacerbée dans le domaine des mathématiques n’a toutefois pas étonné Mme Plante. 

«On sait que l’anxiété, le stress, va davantage affecter les tâches mathématiques, et on pense que c’est (en raison du) type de contenu qui est évalué, très souvent (qui) recrute beaucoup la mémoire de travail. C’est une fonction cognitive qui est particulièrement affectée par le stress et l’anxiété», explique la professeure. 

Les évaluations en langue, comme dans les cours de français, ont de moins grands effets sur le stress puisqu’elles sollicitent souvent des savoirs «encodés à plus long terme». Par exemple, lors d’une production écrite, un élève qui ne se souvient pas de l’orthographe d’un mot peut en choisir un autre. 

«Même les filles anxieuses, ça a quand même moins d’incidence, voire pas d’incidence, sur leur motivation et leur réussite dans les langues», indique Mme Plante. 

Les filles sont bonnes en français, les garçons en mathématiques?

Isabelle Plante a déjà évalué et mesuré l’impact des stéréotypes en mathématiques, selon lesquels les garçons seraient meilleurs dans ce domaine, et que les filles, pour leur part, excelleraient en français. 

«En général, ce qu’on observe, c’est que les stéréotypes en mathématiques ne sont plus vraiment présents. C’est comme si on a fait beaucoup d’efforts pour dire : les garçons et les filles sont capables», explique la professeure. 

«Par contre, ils vont adhérer très fortement aux stéréotypes en langue, disant que les filles ont de meilleures habiletés langagières», a-t-elle poursuivi. 

Des facteurs sociaux pourraient également entrer en ligne de compte en ce qui concerne la propension des filles à être plus affectées par l’anxiété de performance, dont la rumination sociale, ou la co-rumination. 

«Les filles vont avoir tendance à exprimer beaucoup leur anxiété ensemble, et finalement, elles s’encouragent négativement. C’est bien d’en parler, on peut penser que ça va réduire leur anxiété, mais finalement, ça amplifie le problème parce que ça lui donne beaucoup de valeur, détaille Mme Plante. Même si les filles co-ruminent et il y a des garçons dans le groupe, ça n’influencera pas non plus l’anxiété des garçons.» 

Comment faire pour diminuer son anxiété de performance, ou pour aider un proche qui en souffre? Outre les stratégies d’étude ou de gestion du stress, Mme Plante invite à changer le regard que nous portons sur l’anxiété. 

«L’anxiété et le stress ont aussi des fonctions de nous propulser, ce sont des leviers, ce sont des signes que notre corps nous donne pour faciliter la réalisation de certaines tâches, indique-t-elle. Mais, on a tendance à présenter l’anxiété comme quelque chose qui est nécessairement excessivement négatif.»