Ottawa revoit son programme de voyageur vérifié pour éviter le chaos de l’an dernier

MONTRÉAL — Le gouvernement fédéral a annoncé mardi une refonte de son programme de sûreté des voyageurs dans l’espoir que cela aide à désengorger les aéroports en ce début de saison estivale des voyages. 

Le nouveau programme «Voyageur vérifié» prévoit notamment la mise en place de lignes de contrôle réservées dans six des plus grands aéroports du pays d’ici le 21 juin, a indiqué le ministre des Transports, Omar Alghabra. 

«À mesure que le nombre de membres augmentera au fil du temps, le nouveau programme de voyageurs vérifiés contribuera à améliorer l’expérience de contrôle pour de plus en plus de passagers, tout en respectant les normes de sûreté et de sécurité les plus élevées», a affirmé M. Alghabra lors d’une conférence de presse à l’aéroport international de Toronto-Pearson. 

Les modifications apportées au programme permettent notamment aux voyageurs de confiance de garder leurs ordinateurs portables et leurs liquides rangés dans leurs bagages, au lieu de devoir les placer séparément sur le tapis roulant à rayons X, et de garder leurs chaussures et leur ceinture tout au long du processus. Les enfants de moins de 18 ans et les adultes de 75 ans ou plus pourront désormais accompagner les membres du programme dans les files d’attente accélérées. 

Les passagers admissibles comprennent les 1,7 million de membres de Nexus — des voyageurs préapprouvés qui peuvent traverser plus rapidement la frontière canado-américaine —, ainsi que le personnel militaire, les travailleurs de l’aviation et les agents de la Gendarmerie royale du Canada (GRC). Ces personnes pourront accéder aux lignes réservées sans faire de demande préalable. 

L’annonce intervient après des mois de voyages chaotiques l’été dernier, lorsqu’une augmentation de la demande post-pandémique a fait bondir l’achalandage dans les terminaux et submergé les compagnies aériennes. L’augmentation de 300 % du volume des voyageurs «a ébranlé le système et chaque petite chose a entraîné des retards supplémentaires», a souligné mardi M. Alghabra. 

En mars, le budget libéral a prévu 1,8 milliard $ sur cinq ans pour l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien (ACSTA) afin d’améliorer le contrôle des passagers et de renforcer les mesures de sécurité dans les aéroports. 

Alors que le nombre de plaintes de voyageurs auprès de l’organisme de réglementation est désormais supérieur à 47 000, le gouvernement a également déposé le mois dernier une refonte de sa charte des droits des passagers qui augmente les sanctions imposées aux lignes aériennes et cible les lacunes en matière d’indemnisation concernant les bagages et les perturbations de vol. 

«Les prochains mois vont être très occupés, car la saison estivale est sur le point de commencer. Et je suis convaincu, avec la préparation qui a eu lieu par les aéroports, les compagnies aériennes, l’ACSTA et d’autres organisations, que nous sommes prêts pour la saison estivale», a fait valoir M. Alghabra. 

Regain de popularité pour Nexus? 

Le programme mis à jour réduira les files d’attente pour tous les passagers, à mesure que d’autres deviendront «vérifiés» – ce qui réduira le bassin de voyageurs non vérifiés – a expliqué la porte-parole de l’Autorité aéroportuaire du Grand Toronto, Karen Mazurkewich. Avec un contrôle plus rapide aux points de contrôle des voyageurs de confiance, l’ACSTA peut également allouer plus de ressources aux files d’attente de sécurité régulières, a précisé M. Alghabra. 

Cependant, l’expert en aviation John Gradek a exprimé des doutes quant à l’impact global d’une attente légèrement plus courte pour une fraction des voyageurs aériens, notant que le nouveau programme assouplissait quelques règles de contrôle, mais restait essentiellement similaire à la configuration précédente. 

«En gros, on passe d’un nom à un autre, qui est maintenant « voyageur vérifié »», a-t-il noté lors d’un entretien téléphonique. 

M. Gradek, chargé de cours au programme de gestion de l’aviation de l’Université McGill, s’est également demandé si un nombre important de Canadiens choisiraient de s’inscrire au programme Nexus et réduiraient ainsi les lignes de sécurité normales. 

«Vous allez devoir vous attaquer à un nouveau groupe de voyageurs — les non-titulaires de cartes Nexus aujourd’hui — pour les amener à s’inscrire à Nexus. Mais si (M. Alghabra) investit en fait dans le personnel et l’équipement, ainsi que dans la modification des processus pour que tout le monde aille beaucoup plus vite, ça pourrait avoir de la valeur», a-t-il ajouté. 

Le Conseil des aéroports du Canada (CAC) s’est félicité du déploiement du «contrôle fondé sur le risque» – faisant référence non seulement aux lignes distinctes, qui étaient déjà en place, mais aux différents protocoles de sécurité qui devraient commencer le mois prochain. Le dépistage basé sur les risques est en cours dans les aéroports américains depuis plus d’une décennie, a noté la présidente du CAC, Monette Pasher. 

Elle a invité le gouvernement et l’agence de sécurité aéroportuaire à étendre le programme et à créer «un véritable programme national de voyageurs de confiance afin que davantage de Canadiens puissent profiter» des files d’attente plus rapides. 

Actuellement, la plupart devraient faire une demande en plusieurs étapes pour devenir membre de Nexus. Les entrevues avec les agents frontaliers canadiens et américains nécessitent souvent une visite à un centre d’inscription américain, et ceux qui souhaitent éviter un voyage transfrontalier peuvent organiser une rencontre conjointe avec les autorités dans l’un des huit aéroports de six provinces. 

L’inscription à Nexus a augmenté le mois dernier après un arrêt de près d’un an. Le processus est resté suspendu au Canada même après que les centres ont ouvert leurs portes aux États-Unis, en partie en raison d’un différend au sujet du droit des agents américains de porter des armes en sol canadien, entre autres protections juridiques. 

L’impasse a conduit à un arriéré massif de candidatures pour le programme. Mais l’Agence de la sécurité des frontières du Canada en traite maintenant 10 000 par semaine, a affirmé le ministre Alghabra. 

Le nombre de demandes a bondi de 21 % en trois mois pour atteindre 342 000 en juillet dernier, mais il était retombé à environ 212 000 à la mi-mars. 

Les aéroports où les voyageurs de confiance pourront profiter du nouveau programme sont les aéroports internationaux de Toronto, Montréal, Vancouver, Calgary, Winnipeg et Edmonton. La sécurité dans plusieurs autres aéroports offrira aux passagers sélectionnés un service de première ligne et des avantages supplémentaires aux points de contrôle transfrontaliers, a ajouté M. Alghabra.