Tramway de 8,4 milliards $ à Québec: c’est «beaucoup d’argent», dit Legault

QUÉBEC — Devant l’explosion des coûts et le désistement d’un consortium pour la réalisation du tramway, la Ville de Québec a demandé l’accord du gouvernement caquiste mercredi pour un «plan B»: être maître d’œuvre du projet à un coût de 8,4 milliards $.

La dernière estimation connue s’élevait à 4 milliards $. 

Le gouvernement caquiste, principal bailleur de fonds, a immédiatement émis des doutes, mais le fédéral a réitéré son appui mercredi. 

«D’abord, 10 milliards $, c’est beaucoup d’argent, c’est inquiétant», a riposté François Legault au parlement en révisant déjà à la hausse, sans reprendre le prix du maire, le coût de la facture proposée par la Ville. 

Le premier ministre et sa ministre des Transports, Geneviève Guilbault, veulent rencontrer le maire de Québec, Bruno Marchand, dans les prochaines semaines. 

«Beaucoup plus cher»

«C’est sûr que c’est beaucoup plus cher», a à son tour commenté Mme Guilbault en mêlée de presse. 

«Ça va faire partie des discussions qu’on aura avec la Ville. La chose intelligente à faire, comme partie prenante du projet avec la Ville, c’est d’aller en discuter directement avec (la Ville).»

M. Legault avait indiqué récemment que le projet de «transport lourd» de Québec nécessiterait des ajustements et les partis d’opposition ont tous accusé le gouvernement, mercredi, d’hésiter et de ne pas appuyer clairement le projet.

«Repartir à zéro remettrait en question notre capacité à réaliser de grands projets», a mis en garde M. Marchand en conférence de presse à l’hôtel de ville.

Plan B

Il a expliqué que le dernier consortium en lice s’était désisté de l’appel d’offres et il a proposé un «plan B»: que la Ville prenne en charge elle-même la réalisation du projet, parce qu’elle n’a pas pour objectif de faire des profits et parce qu’elle connaît son territoire et les partenaires sur le terrain.

«Nous sommes ouverts à regarder d’autres plans, cependant, il y a une condition sine qua non: ça ne peut pas retarder la réalisation du projet», a imposé M. Marchand en conférence de presse. 

«On ne peut pas ajouter de délais indus, on ne peut partir en réflexion et en consultations pour des mois, en disant: peut-être qu’il y aura d’autres projets qui verront le jour.»

Il y aurait notamment ainsi «le risque de perdre des entreprises avec qui on a déjà signé des ententes, notamment Alstom», qui construirait le matériel roulant.  

Appui d’Ottawa 

En outre, d’autres villes au Canada lorgnent la contribution fédérale de 3 milliards $ destinée au tramway de Québec et la Vieille Capitale ne peut donc se permettre de renoncer à cette enveloppe, a argué le maire.  

«Des villes canadiennes se battent» pour obtenir la somme, a-t-il poursuivi. «Est-ce qu’on peut se priver de ces sommes? La réponse est non.»

Le gouvernement Trudeau a rappelé que Québec est la seule ville de taille comparable au Canada à ne pas avoir de réseau de transport structurant. 

«Ou bien on rattrape le retard ou on laisse ces milliards de dollars aller ailleurs au pays dans des endroits qui se sont déjà beaucoup développés au cours des dernières années», a prévenu le ministre fédéral Jean-Yves Duclos, aussi député de Québec. 

À l’origine, il avait été convenu de partager la facture initiale de 4 milliards $ à raison de 50 % revenant au gouvernement au Québec, 40 % au fédéral et 10 % à la municipalité.

M. Duclos a considéré comme acceptables les dépassements de coûts, qu’il dit constater dans tous les projets d’infrastructures au pays.

Le maire a pour sa part fait valoir que les deux tiers de l’investissement de 8,4 milliards $ iront en retombées locales au Québec.    

Plus de 500 millions $ ont déjà été investis dans le projet depuis six ans.

Les estimations qui circulaient dans les médias récemment évoquaient une facture des soumissionnaires pouvant aller jusqu’à 13 milliards $, sans que ce soit confirmé par la Ville.

Tracé

Le maire propose de réaliser le tracé de 19,3 km en trois segments, pour que la mise en service ait lieu plus rapidement et que les usagers en découvrent les bénéfices. 

Ainsi, le tramway serait déployé d’ouest en est, du secteur Le Gendre à l’Université Laval, ensuite de l’université vers Saint-Roch, au centre-ville, puis de là jusqu’à D’Estimauville, dans l’est.