Une officière de liaison de la police d’Ottawa témoigne au procès Lich-Barber

OTTAWA — La policière qui avait été agente de liaison entre la police d’Ottawa et les manifestants du «convoi de la liberté» à l’hiver 2022 a déclaré mercredi au procès de deux organisateurs que ce sont plusieurs convois qui se dirigeaient vers la capitale fédérale.

L’agente Isabelle Cyr avait été appelée à la barre lors de la deuxième journée du procès de Tamara Lich et Chris Barber, en septembre. Mais son contre-interrogatoire avait été interrompu après que la défense a demandé une copie des messages de clavardage et des courriels de la police.

La policière est revenue à la barre mercredi pour répondre à des questions sur son rôle d’agente de liaison pour certains des organisateurs associés au groupe des coaccusés.

Avant même l’arrivée du convoi à Ottawa, Mme Cyr a d’abord contacté Chris Barber pour tenter d’obtenir des «informations concrètes» sur le déroulement de cette manifestation, a-t-elle déclaré mercredi. Elle a ensuite été référée à un autre organisateur, Chris Garrah, avec qui l’agente de liaison a eu des contacts presque quotidiens par la suite.

En contre-interrogatoire, Mme Cyr a déclaré que M. Garrah lui avait dit que les manifestants associés au groupe officiel «Freedom Convoy» devaient s’inscrire afin de recevoir de l’argent pour leur nourriture et leur carburant. Il lui a aussi dit que les manifestants devaient signer un code de conduite — même si l’agente Cyr n’en a jamais vu de copie.

Chris Barber et Tamara Lich font face à plusieurs accusations, notamment de méfaits et d’avoir conseillé à d’autres de commettre des méfaits. La Couronne espère prouver que les deux coaccusés ont exercé une influence sur la foule de manifestants qui ont bloqué un secteur d’Ottawa pendant plus de trois semaines, pour protester contre les restrictions sanitaires.

Plusieurs groupes  

La défense, quant à elle, a souligné que la manifestation réunissait plusieurs groupes ayant des objectifs et des positions idéologiques différents. Mme Cyr a d’ailleurs indiqué mercredi que cet élément avait été souligné lors d’une réunion à laquelle elle a assisté environ une semaine avant l’arrivée du convoi à Ottawa.

Lors de cette réunion de renseignement de la police, le 25 janvier 2022, des inquiétudes ont été soulevées quant au fait que divers groupes avaient rejoint la cause originale et qu’il serait «difficile de contrôler tout le monde», a résumé l’avocat de Mme Lich, Lawrence Greenspon. Mme Cyr s’est dite d’accord avec cette affirmation. 

Le 27 janvier, quelques jours seulement avant l’arrivée des manifestants à Ottawa, Mme Cyr a demandé aux autres agents de liaison de la police, lors d’une discussion de groupe, s’ils savaient combien de convois différents arriveraient à Ottawa, en dehors du «groupe de Bauder».

James Bauder, cofondateur d’un groupe appelé «Canada Unity», avait collaboré avec Chris Barber, Tamara Lich et d’autres pour organiser le convoi initial.

«Vous ne saviez pas combien de convois allaient arriver à ce moment-là?», a demandé Me Greenspon à Mme Cyr.

«Non, je ne le savais pas.»

Les Farfadaas

Lors d’une autre discussion de groupe avec des collègues policiers, Mme Cyr a souligné que plusieurs des camions arrivés le 30 janvier en provenance du Québec appartenaient à un groupe appelé «Les Farfadets».

Son clavardage pourrait faire référence au groupe «Les Farfadaas», qui s’opposait fermement aux mesures sanitaires liées à la COVID-19 au Québec et qui a été très présent lors de la manifestation du convoi à Ottawa.

Me Greenspon est également revenu sur des témoignages antérieurs concernant la durée prévue de la manifestation et l’endroit où la police a demandé aux poids lourds et autres véhicules de se stationner. 

Il a posé des questions sur le témoignage de l’inspecteur Russell Lucas, qui a déclaré à la cour que les efforts des policiers pour réduire l’empreinte de la manifestation ont été contrecarrés par les instructions du commandement supérieur après le premier week-end «de ne pas céder un pouce aux manifestants».

Mme Cyr a indiqué qu’elle avait demandé à plusieurs reprises l’autorisation de déplacer des camions, mais que M. Lucas avait rejeté ces demandes.

L’un de ces cas concernait des manifestants associés aux Farfadaas. Leurs camions étaient situés à une courte distance de l’épicentre de la manifestation, mais ils ont demandé à les déplacer plus près de l’endroit où d’autres manifestants s’étaient garés.

Le 11 février, un autre agent de liaison, le sergent Fong Le, a expliqué au groupe de clavardage que le manque d’autorité des policiers avait conduit à un «échec catastrophique», ce qui n’a fait que renforcer les manifestants des Farfadaas et leur a fait comprendre à quel point leur position était précieuse.

La Couronne devrait appeler à la barre cette semaine davantage de policiers qui ont joué un rôle de liaison pendant la manifestation à Ottawa.